Mon histoire commence en 2245, et comme beaucoup ici, dans un bunker du Colorado, l’abri antiatomique de feu Todd Peterson, renommé par la Confrérie Maxson Bunker en souvenir du leader charismatique des siens et de sa descendance. Que dire des premières années ? Sombres, humides et froides, à l'abri du soleil et du sable, à l'abri des raiders et des légionnaires, à l'abri enfin des super mutants. C'était une chance de pouvoir grandir et vivre dans un endroit tel que celui-ci sans avoir à se soucier de quoi sera fait le lendemain. C'est aussi pour ça que la Confrérie est puissante, car ses membres ont l'intime conviction que tout cela est éternel. Je partage cet avis, et je n'imagine pas la vie de demain sans le Chapitre. Je ne me vois pas parcourant les terres arides et désolées, seule, avec la sécheresse pour unique compagne. Néanmoins, quand on a passé son enfance dans le dédale souterrain du bunker, apercevoir pour la première fois le soleil est quelque chose de grandiose et d’effrayant à la fois. Et le ciel ! Le ciel, si haut, si grand ! A croire qu’il pourrait nous aspirer si l’advenait que nous sautions trop haut. Les croyances enfantines que je pouvais avoir sont loin derrière moi maintenant, mais quand j’y repense, je les trouve amusantes et tellement naïves, c’est ce qui caractérise la beauté de l’être humain en bas âge. Je n’avais besoin de ne me soucier de rien d’autre que de moi. Rapidement, quelques petites tâches me furent confiées quand arriva l’âge de devenir écuyer de la Confrérie. Un honneur pour moi malgré le fait que je sois encore qu’une gamine. J’étais très fière de servir la cause de mes parents, et au delà d’eux, des grands.

Mes années d’écuyers passèrent somme toute, assez rapidement. J’arrivais bientôt au rang d’initié et je commençais à tâter doucement des armes et autres joyeusetés de ce genre. Finie les corvées de ménage, d’entretien, et autre. Parallèlement, nous commençâmes à étudier différentes matières censées nous ouvrir l’esprit. Cela permettait également de commencer à détecter les accointances avec le savoir que briguent les scribes. J’étais plutôt polyvalente sans être exceptionnelle partout. Je me démarquais cependant des mes camarades à cause de mon obéissance aveugle envers l’autorité. Jamais je ne ratais un devoir à faire quand nous en avions, jamais je ne faisais pas ce qu’on me disait. Les petits rigolos, qu’on retrouve partout cela va s’en dire, étaient du genre à me taper sévèrement sur le système. Quoiqu’il en soit, je découvrais par l’entremise des cours, des formations et des exercices, le vaste monde qui m’attendait une fois dehors. C’était une forme d’embrigadement, de conditionnement. La quête de la technologie et la haine des mutants, la Confrérie avant tout. Ce Chapitre avait quand même la particularité d’être ouvert aux étrangers, et il prônait un partage du savoir. Très vite, je me passionnais pour les sciences, et plus particulièrement, j’étudiais la médecine. On me pressentait comme scribe du fait de mon avidité absolue concernant le corps humain. Mais je n’étais pas mauvaise non plus dans toutes les disciplines physiques, je me débrouillais plutôt bien avec une arme, enfin assez bien pour ne pas trouer le dos de mon collègue devant moi par inadvertance. J’étais encore jeune et frêle, et il fallait que mon corps s’habitue à la charge à laquelle il était soumis au quotidien. Les muscles se dessinèrent, se formèrent, et plus ma croissance avançait, plus j’arrivais à mieux supporter les affres des longs exercices physiques prompt à vous briser mentalement. Nous n’étions pas loin de former une armée d’enfants soldats. Les premiers émois, les premières aventures, la personnalité se fige, le corps s’endurcit, et un jour, nous sommes prêt.

Apprentie, enfin ! J’ai 20 ans à peine. C’est peu après ma nomination que j’apprends la nouvelle. Je suis enceinte de quelques semaines. Tout s’arrête pour moi à partir de cet instant. Les enfants sont précieux dans la Confrérie. Chaque membre est supposé engendrer un rejeton pour pourvoir au renouvellement des effectifs. Je sais que mon apprentissage reprendra une fois que j’aurai accouché mais j’ai le sentiment de perdre du temps. Cette sensation passe rapidement, les hormones jouant, le fait de devenir mère m’enchante au plus haut point. Qui plus est, je peux continuer à me former à l’art subtil de la médecine, et je profite de mes journées calmes et plates, pour apprendre. Le père est un apprenti lui aussi. Nous avons grandi ensemble. Nous nous affichons sans trop de problème. Sa vocation à lui ? Devenir scribe. Il le sait, il a ça dans le sang. L’ordre des épées le botterait plutôt bien. Je vous aurai bien dit d’aller le rencontrer pour vous faire une idée de sa personnalité, mais malheureusement, la vie me l’a fauché deux ans environs après la naissance de notre enfant. Quelque part au fond de moi, une partie de mon âme s’en alla pour toujours. Je demeurai cependant forte et courageuse pour le petit garçon qu’il m’avait laissé comme souvenir et dont j’étais la mère. Je n’ai pas tellement envie d’en parler aujourd’hui, vous m’excuserez.

Ma formation d’apprenti continue. Je suis un peu plus vieille du fait de mon arrêt de quatre ans nécessaire à mon deuil et au maternage du mon bambin. Néanmoins, ma maturité et mon expérience en médecine me font rattraper rapidement mon retard. Et je sais que toutes les femmes qui sont dans ces unités seront un jour, si la nature le veut, des mères. Enfin de toute manière, je ne suis pas là pour faire la course avec les autres dans le but d’être la première à un poste ou à un autre. Je passe mon temps entre mon enfant, mes études, mes patrouilles, mes missions avec les chevaliers et paladins, les corvées, je commence également à exercer à l’infirmerie. Bref, le temps me manque pour tout faire, mais j’aime ce côté rempli de ma vie, ça me permet de franchir un cap et de faire un deuil complet. Je vois mes premiers morts en mission, j’interviens de plus en plus.

Je passe le cap des trente ans assez rapidement tant ma vie est trépidante. Les sphères supérieures décident de me promouvoir au rang de Chevalier de la confrérie. J’ai fait mes preuves, j’ai montré mon courage, ma détermination et ma loyauté. J’endosse le titre avec fierté, et je sais que dorénavant, je serais dans le bain jusqu’au cou. Non ça ne me fait pas peur, dans le sens où ça fait maintenant une paire d’années que je suis les formations, assistant le médecin chevalier.

Et la vie suit son cours, tranquillement certains jours, un peu plus prenante d’autres jours. J’ai trente cinq ans, toutes mes dents, et je continue dans la voie qui est la mienne.