La Lune pointe haut dans le ciel. Un ciel clair, dégagé, laissant entrevoir la moindre poussière d’étoile pouvant trôner au-dessus de nos têtes. Une nuit où la Lune est pleine, une nuit où les terres sont claires. Une nuit où l’on n’entend rien, pas un bruit, si ce n’est le souffle du vent se perdant dans une mélodie sifflante. Tout est désert, tout est calme : TROP calme ! Pourtant, les minutes s’égrènent encore et encore sans qu’aucun cri ne soit poussé, sans qu’aucune terreur ne se manifeste. La faune et les êtres violents semblent avoir voté absent pour cette atmosphère fantomatique, oppressante. Presque tous ne se manifestent pas, presque tous ne sont pas ici… Sauf elle. Sauf eux.
Des bruits de moteur vrombissent. La sonorité de roues, de pneus se frayant un chemin à travers des sentiers battus commence à résonner. A l’éclairage de la Lune se mêle le faisceau de six véhicules. Six deux roues, six motos. Ils roulent, conquérants, sans se soucier des dangers qu’une nuit au sein des Terres Désolées peut receler. Ils roulent vers l’aube, ils roulent vers l’horizon. Silencieux, concentrés, redoutables, les Ghosts filent à toute allure vers la survie, vers leur avenir. A leur tête de ces Raiders, à la tête de ces motards, de ces Ghosts, Trixie Deux-Roues roule vers son destin. Trixie roule vers sa vengeance !

Blonde fatale, incendiaire et vindicative, Trixie n’est pas seulement une femme, non : elle est motarde avant tout ! Née en tant que telle, vivant comme motarde et sans nul doute destinée à mourir comme cela, seul le Colorado pouvait accueillir la naissance d’une telle créature. Ses déserts, ses plaines, ses allées ouvertes à tous les routiers et tous les motards… Le plus symbolique et le plus significatif des Etats pour une femme de cette trempe. Une femme dont l’histoire commence, plus précisément, il y a trente-deux ans de cela, au sein des ruines du Musée de l’apocalyptique Denver. Des premiers cris poussés au centre d’un groupement de plusieurs personnes qui ouvrirent leurs bras à cet enfant comme si la population du monde entier accueillait le nouveau messie. Mais, rassurez-vous, de messie il n’était nullement question. Ce bonheur apparent et cet enthousiasme  de la majorité des personnes présentes, de la majorité des Ghosts, n’était qu’une façon de constater le lien presque familial qui unissait tous les membres de cette bande.
A cette époque, les Ghosts Riders étaient composés d’une quinzaine de personnes. Leur chef répondait au nom de Bulk L’Incendiaire : un solide trentenaire au comportement quelque peu désaxé et fortement porter sur la violence et les cocktails molotov. Bourru, aigri et d’un comportement extrêmement rude, cet homme délaissa son apparence traditionnelle au profit d’une image plus douce et émerveillée : la naissance de Trixie n’était pas seulement la première naissance au cœur de la bande. C’était avant tout la naissance de sa nièce et filleule ! Bulk n’était autre que le frère de la mère de Trixie, Gina La Diva, une femme d’une grande beauté et qui représentait l’atout charme des Ghosts. Son compagnon, Wade Le Roublard, avait à peine passé le cap de la trentaine et se voulait beaucoup plus calme que son leader, sans pour autant en être moins dangereux. La famille venait donc de s’agrandir et, de par sa venue au monde au sein des motos, des motards, Trixie Kensington fut officiellement baptisée Trixie Deux-Roues.
Comme tout le monde, Trixie ne possède aucun souvenir de ses toutes premières années. La bande des Ghosts minimisa toutefois les voyages de par la présence de la petite en leur sein et, aussi primal pouvait-il être par moment, Bulk n’envisageait pas une seule seconde l’idée qu’il puisse mettre la vie de sa filleule en danger. Ainsi, les Ghosts survécurent principalement dans les ruines de Denver en tentant de minimiser, autant que possible, les mauvaises rencontres avec d’autres survivants, voir les créatures immondes qui peuplaient les anciennes rues de cette ville détruite. C’est à Denver qu’elle naquit et c’est à Denver que Trixie eut également son tout premier souvenir : la naissance de son frère, de quatre ans son cadet. Un petit bout de garçon qui vint au monde sous l’amusant prénom de Tex. Tex Kensington, surnommé plus tard Tex l’Avarice, de par sa tendance à toujours vouloir s’accaparer la moindre trouvaille, le moindre trésor. Tex, son petit bout à elle, son petit bonhomme, son bébé. Une considération s’expliquant naturellement par les décisions prises par Bulk et Gina. Les Ghosts étaient restés trop longtemps à terre. Les Ghosts étaient restés immobiles plus qu’ils ne le pouvaient, plus qu’ils ne le devaient. Au semblant de sédentarisme qui fut leur, il était temps de retrouver l’aspect nomade de leurs existences. Ainsi, Gina veillerait sur ses deux enfants. Wade veillerait sur ses bébés. Bulk protégerait sa famille mais, pour sa part, aussi jeune soit-elle, Trixie devait se responsabiliser de la présence de Tex.

Les jeunes années du frère et de la sœur n’étaient pas ce qu’il y avait de plus heureux, sans pour autant être un véritable cauchemar. Les Terres Désolées ne sont tout simplement pas un endroit où vivre sereinement pour des petits bambins mais ils se devaient de faire avec. Ils n’avaient pas le choix : personne n’avait plus le choix ! Mais chacun des deux trouva son intérêt et ses petits plaisirs malgré tout. Tex était un garçon très éveillé qui aimait déjà partir à la recherche de tout, partir à l’exploration de tous les lieux environnants et, si Trixie en avait la réponsabilité, c’est surtout leur mère qui se retrouva, plus souvent qu’on ne saurait dire, à partir à la recherche de son fils. Inattention de Trixie, faute de comportement dans la confiance que l’on avait envers la grande sœur : sauf que la grande sœur avait ses propres centres d’intérêts ! A défaut de suivre perpétuellement son petit frère, la jeune Trixie baigna bien rapidement dans les plaisirs de la mécanique. Apprendre tous les rudiments pour réparer une moto, découvrir tous les plans B auxquels on se devait d’avoir recours pour entretenir un engin sans véritable matériel de rechange. Savoir improviser et user de tout ce qui est à sa portée, pour toujours s’en sortir, pour toujours s’en tirer. Un apprentissage qui pouvait parfois se révéler surprenant mais également extrêmement rude. Mais un apprentissage qu’elle adorait, ne fut-ce que parce que cela lui permettait de passer sereinement du temps avec son père, et son oncle.
Ca, c’était pour la partie visible de l’Iceberg. Encore innocents, Tex et Trixie n’avaient aucune connaissance des agissements de leurs parents, des membres des Ghosts, de toute leur ‘famille’. Ils ignoraient que chacun d’entre eux étaient des pillards sans foi ni loi semant la terreur et la mort sur leur passage, sous les ordres de leur bienveillant mais étrange oncle Bulk. Ils étaient encore jeunes, trop jeunes pour savoir, trop jeunes pour comprendre. Ce n’est que durant la douzième année de la jeune Trixie que le coup du sort fit voir aux enfants le véritable visage de leur cercle. Ils avaient tous trouvés refuge pour la nuit dans une vieille bâtisse abandonnée. La majeure partie des Ghosts étaient réunis autour d’un feu de fortune en train de se nourrir de la maigre nourriture qu’ils avaient pu trouver. Mais, à défaut d’un grand repas de roi, l’ambiance était présente et se voulait légère, agréable… Jusqu’à ce qu’une autre bande de voyageurs, une autre bande de Raiders, surgisse en surnombre. Violents, fous, complètement shootés, ils s’en prirent aux Ghosts qui se lancèrent tous dans une lutte solide et violente. Un spectacle assez marquant pour les deux enfants. Un spectacle qui sembla divertir Tex mais qui, du côté de Trixie, la choqua violemment. Elle en demeura silencieuse, troublée, perturbée et muette pendant les jours qui suivirent.
Toutefois, l’attaque avait laissée des traces. Trois d’entre eux avaient trouvé la mort. Certains avaient été touché et, Gina La Diva, avait été salement touchée par une lame rouillée. Comme toute mère protectrice, elle avait caché cette blessure à ses enfants. Elle avait fait comme si elle avait déjà guéri et que la blessure n’était pas bien grave. La vérité, c’est que la plaie s’infecta et que sans produits de soins adéquats, son état ne pouvait s’améliorer. Cela prit des jours, des semaines mais nul ne pouvait empêcher l’inévitable. Si Trixie semblait avoir du mal à se remettre de toute la violence dont elle avait été témoin, c’est le jour où ils enterrèrent tous le corps sans vie de Gina que la blondinette comprit le pourquoi de cette violence. Le pourquoi de savoir se battre. Le pourquoi de la rage implicite et innée qui alimentait la véritable force de la survie.

L’adolescence rima avec l’apprentissage à cette survie. Savoir tenir le guidon d’une moto était une chose. Savoir réparer une bécane en était une. Mais, se battre, piller, voler et tuer était un art plus complexe à apprendre. Car non, chez les Ghosts, cela n’était pas une question de talent naturel mais simplement d’apprentissage et ils en firent un véritable exemple avec Tex et Trixie. Un apprentissage qui semblait plus facile et aisée avec le frère. Même si elle ne voulait pas se l’avouer, Trixie avait cette forme de douceur et d’innocence plus prononcée… Jusqu’à ce qu’elle goutte à sa première agression ! D’habitude, l’adolescente restait en retrait durant les raids de sa ‘famille’. Avec un autre Ghost, elle s’occupait de surveiller, d’être l’alerte en cas de danger, d’être le signal de replis. Ce n’était pas une honte en soi, après tout, il faut toujours une personne s’occupant de ce sale boulot. Implicitement, cela soulageait les inquiétudes de son père mais, en contrepartie, alimentait la honte de son oncle ! Lui qui était si fier d’avoir eu une nièce, et elle qui n’était même pas foutue de s’en montrer digne… Mais, ce soir-là, son innocence disparu totalement.
Trixie avait 17 ans. Elle venait d’avoir une violente altercation avec son oncle et, prétextant un repérage des lieux, quitta le campement avec le cœur lourd et l’égo touché, enragé, exalté. Traversant des vallons, partiellement aveuglée par le noir, notre blondinette ne prit pas attention qu’elle était en train de se frayer un chemin sur la zone de chasse de plusieurs Radcafards. Et lorsqu’elle s’en rendit compte, il était trop tard, elle était prise au piège. Sans armes à feu, sans véritable moyen de se défendre, elle tenta vainement de fuir, voyant son heure arrivée… Jusqu’au moment où de solides coups de feu se firent entendre à plusieurs reprises et que les Radcafards explosèrent sous la violence du choc. Ils étaient trois. Trois voyageurs. Trois nomades qui venaient d’offrir le rédemption à notre blondinette.
Tout a un prix dans la vie, Trixie l’avait appris, Trixie le savait. Elle avait encore une part d’innocence l’empêchant de devenir une Raider et une Ghost digne de ce nom mais elle n’était pas stupide et savait qu’il faudrait plus qu’un simple merci pour se montrer digne du geste samaritain qu’avaient eu ces inconnus pour elle. De la nourriture, des capsules ou des pièces d’outillages ? Elle était prête à marchander tout ce qui était marchandable, mais elle n’imaginait pas qu’ils demanderaient un tel prix : son corps ! Oui, Trixie devrait ‘y passer’ pour honorer un payement digne de ce nom et, si elle ne voulait pas, elle se retrouva rapidement au sol sous les mains et les oppressions de ces trois samaritains déchus. Elle commença à être touchée, à être caressée, à être parcourue, à être pénétrée. Souillée, petit à petit, de plus en plus, sa peur et sa honte se transformèrent subitement en hargne et en rage lorsque sa main sentit le contact d’une grosse pierre. D’un geste sec, elle l’abattu de toutes ses forces sur le crâne de l’homme au-dessus d’elle. Elle repoussa le corps endolori de ce dernier et, telle une prédatrice enragée, se munit aussitôt de son arme pour abattre les deux autres monstres qui s’amusaient du spectacle en attendant leur tour. Leurs deux silhouettes sans vie s’échouèrent sur le sol. Trixie vint s’agenouiller sur le corps de celui qu’elle avait assommé. Ressaisissant une pierre, elle commença alors à hurler et jurer de rage tout en éclatant violemment la roche sur le visage de l’homme à plusieurs reprises.
Lorsqu’elle regagna le campement des Ghosts, Trixie ne fut plus la même. Son regard avait changé. La lueur dans ses yeux symbolisait qu’elle avait compris ce que son oncle lui avait toujours dis. Plus d’innocence, plus de pitié. La vie au sein des Terres Désolées est rude, violente, impitoyable. Ou l’on sème la terreur, ou l’on devient victime. Trixie ne prendrait plus jamais le risque d’être une victime, d’être faible, d’être le jouet de personnes sans pitiés et sans âmes. Lorsque Trixie revint au camp, son déclic s’était manifesté. Une fille était partie en repérage, mais une Ghost revint. A partir de maintenant, elle ne serait plus en retrait. A partir de maintenant, elle ne serait plus derrière à attendre. A partir de cette nuit, Trixie se rendit compte, Trixie sut qu’elle devait devenir la véritable actrice de cette vie, de cette existence.

Rouler, vivre, grandir et vieillir. Bulk demeurait toujours à la tête des Ghosts mais l’âge commençait tout doucement à laisser ses marques sur le physique de l’oncle. Il ne perdait rien de sa hargne ou de sa vigueur mais il n’avait plus l’endurance de ses jeunes années. Le jour où il du mettre sa fierté de côté pour l’accepter, il fut bien évidemment trop tard. C’était il y a dix ans. C’était une journée ensoleillée mais paradoxalement morne. Une journée calme. Une journée qui sentait la mort, qui puait.
Les Ghosts trainaient dans les abords de Boulder. Même pour des rois de la route comme eux, il était de notoriété que rôder autour de cette zone n’était pas spécialement indiqué. Mais qu’importe ! Ils n’y faisaient qu’un passage rapide. Le temps de passer devant cet horizon maudit et de disparaître au loin dans l’horizon. Un horizon qui était encore loin, très loin, trop loin… Les choses s’étaient passées rapidement, extrêmement vite. Des goules surgirent brusquement, se lançant sur des motards surpris et incapables de prévoir une telle attaque. Quatre des Ghosts périrent directement au début de cette attaque alors que Bulk beugla à Wade de mener le reste de la bande vers l’horizon. Il se chargerait de les couvrir avant de les rejoindre. Trixie protesta mais ne fut pas entendue. La bande continua sa route, les Ghosts restant continuèrent de rouler, sans Bulk… Et sans Tex ! Dans sa fougue de jeune premier arrogant, il s’était mis en tête de seconder son oncle. Une croisade héroïque, ou tout simplement folle.
Les huit Ghosts restant s’étaient éloignés des terres de Boulder. Ils étaient immobiles. Ils attendaient. Wade et Trixie demeuraient comme leaders naturels, supérieur aux autres, à observer et espérer. Mais les heures succédèrent aux minutes et, sans qu’ils ne prononcent la moindre parole, le père et la fille avaient compris que les deux membres de leur famille de sang ne reviendraient pas, ne reviendraient jamais. Tex avait toujours retrouvé le chemin de la ‘maison’ et un vieux briscard comme Bulk savait quel chemin prendre pour rejoindre les Ghosts. Mais aucun des deux ne pouvaient continuer leurs routes. Aucun des deux ne pouvaient encore chevauchés leurs bécanes vers le soleil couchant. Deux Ghosts de plus étaient tombés. Il fallait l’accepter : les Terres Désolées avaient une nouvelle fois exprimée leur sinistre volonté. Inutile de s’appitoyer ou de pleurer leurs tristes sorts. Cela ne les ramènerait pas et, en cette funeste nuit, Wade devait se soucier de ce qu’il avait sous les yeux : le reste des Ghosts, attendant les ordres de leur nouveau chef de file ! Lorsqu’ils reprirent la route, ce n’est plus avec un sourire, ni même des éclats de voix et des railleries en tout genre. Leurs visages à tous étaient sévères, froids, glacials, renfermés. Les Ghosts étaient en deuil comme il ne l’avait jamais été. Bulk avait été plus qu’un leader, il avait été un rassembleur, il avait été le créateur, le fondateur de ces croisés à deux roues. Il avait été leur guide de vie et de survie. Certes, il n’était pas immortel mais, avec les années de succédant, c’est comme s’il était devenu atemporel et qu’il serait toujours là. Non, les Ghosts. Non, Trixie. Rien n’est immortel et nul n’est jamais à l’abri.

Le quotidien de vols, de saccages, de pillages, de viols et de meurtres des Ghosts se perpétua jour après jour, mois après mois, années après années. Jusqu’à ce que la route de Trixie et des siens croisent celle d’un étrange raider solitaire répondant au nom de Jax. L’homme qu’elle traque aujourd’hui, l’homme dont elle veut la peau purement et simplement !
Sans honte et sans remords, les Ghosts ne prirent pas la vie de l’errant, mais prirent plaisir à le priver de sa liberté. Ne sachant encore ce qu’ils allaient faire de lui, le prénommé Jax demeura leur captif pendant plusieurs semaines. On lui assigna rapidement des petites tâches ingrates, des petites tâches de réparation et de maintenance. On l’utilisait comme éclaireur lorsqu’il fallait aller quelque part et, derrière cela, son rôle était un peu semblable à celui d’un morceau de chair à canon. L’humain qu’on utilise, l’individu bouclier qu’on utiliserait et délaisserait une fois qu’il ne pouvait plus réellement servir à quoique ce soit.
Mais de sa présence, Trixie s’en était habituée, s’en était accoutumée. Sans parler de franche camaraderie, elle noua à plusieurs reprises le dialogue avec lui et, naturellement, une forme de provocation et d’arrogance construisit ce semblant d’entente qui respirait une pointe de respect. Si bien qu’un soir, Trixie demeurait seule, réveillée, en compagnie de Jax au bord du feu de camp. Visiblement lassé de n’être qu’un objet pour tous les Ghosts, il menaça ouvertement Trixie de prendre la vie du chef, de prendre la vie de son père si cette mascarade continuait. Croyant, au début, à une simple provocation sans fondement, elle défia Jax. Ce n’est qu’une fois maîtrisée et mise au sol par le raider qu’elle remarqua la lueur de détermination et de sérieux qui régnait dans ses yeux. Elle le repoussa. Elle se redressa et, sans même lui accorder le moindre regard, elle lui rendit sa liberté en prenant sur elle d’expliquer les raisons de cette ‘disparition’. Jax ne plaisantait pas et il avait la rage suffisante pour pouvoir tuer Wade. Trixie ne voulait pas courir le risque. Trixie n’aurait supporté de voir la vie de son père être enlevée sans avoir agit pour l’en empêcher.
Le lendemain, elle simula un mauvais coup et expliqua que le raider l’avait prit par surprise avant de l’assommer et de prendre la fuite. Wade haussa des épaules. Certes, son orgueil avait été touché que son jouet se soit fait la malle de cette manière mais il n’allait pas pleurer pour autant. Ce n’était qu’un pantin et rien de plus. Cela n’entachait nullement la survie des Ghosts, ni même leurs croisades routières aux quatre coins du Colorado. Ainsi, la ‘famille’ reprit la route et repartit vers la conquête de ces terres hostiles et arides. Toutefois, si tout reprit comme si la présence de Jax n’avait jamais existé au sein des Ghosts, Trixie n’imaginait pas à quel point sa clémence finirait par l’affecter elle-même et à quel point elle regretterait cette erreur de jugement.

JAX ! Le nom du raider dont elle veut la peau. Le raider dont elle veut la mort. Et si sa hargne est si grande et sa détermination si violente, c’est parce que ce salopard, en guise de reconnaissance, était venu lui prendre ce qu’elle avait de plus cher !
Il y a trois semaines d’ici, les Ghosts s’étaient offert le confort d’une petite demeure isolée où vivait un petit couple sans histoire. Arrivant sur place, les motards réalisèrent leurs petits rituels habituels. Saccage de la demeure, vols des ressources en présence et Trixie appuyant sur la gâchette face au jeune homme un peu trop ambitieux et un peu trop rebelle. Lorsque le gêneur tomba sa vie et que les Ghosts avaient eu ce qu’il voulait, Trixie échangea un regard avec son père. Wade avait d’autres idées et d’autres envies plus particulières concernant la survivante. Trixie comprit naturellement et éloigna les Ghosts. Le soleil se couchait, la journée s’achevait. Elle passa la soirée à discuter avec un des nouveaux Ghosts ayant rejoint récemment la bande. Ce dernier l’interrogea d’ailleurs sur le fameux Jax, le raider aux chiens qui avait croisé la route des Ghosts la veille en après-midi. Le raider pour qui Trixie avait eu une attention particulière du regard. Une attention qui n’avait nullement échappé au Ghost en herbe. Elle n’entra pas dans les détails mais se sentie amusée d’évoquer le souvenir de cet ancien captif. La discussion finit par se rompre. Le sommeil emporta les Ghosts.
Lorsque l’aube pointa, Trixie fut la première réveillée et s’étonnait de ne toujours voir aucune trace de son père. Réveillant un des Ghosts, elle demanda à ce dernier de surveiller le campement le temps qu’elle revienne. Instinctivement, elle reprit la route menant vers la demeure de la veille. Elle escalada une petite bute, vit la silhouette de la maison et, quelques secondes après, découvrit la dépouille nue, dépouillée, ensanglantée et déchiquetée de son père. Des traces de sang, des traces de morsures : un véritable bain morbide qui n’offrait qu’une pâle version du corps du leader des Ghosts. Une vision qui électrisa froidement tout le corps de la blonde, de Trixie, de Deux-Roues. Un sentiment de profonde déchirure naquit en elle mais se vit rapidement submergé par la rage, la colère, la haine. Un Jax et ses chiens croisés il y a deux jours… Le souvenir d’un murmure jurant la mort de son bourreau… Et la pitié d’une libération qui n’aurait dû se faire que sous le bruit d’un coup de feu… Trixie allait le traquer. Trixie le retrouverait. Trixie aurait sa peau pour cette infamie !!!

Les Ghosts continuent de rouler à travers le désert des Terres Désolées. La pleine lune est toujours haute et triomphante. Le bruit de leurs moteurs rugit comme une clameur morbide. Le regard de Trixie est voilé par la rage du sang et l’appel de la vengeance. Elle roule. Elle continue de rouler, sans s’arrêter, sans oublier. Son prochain arrêt serait devant la tombe : la sienne ou celle de Jax. Mais si elle doit mourir, elle l’entraînera avec lui. Les Deux-Roues écraseront les Trois-Doigts. Le verdict sera fatal !