Poings sur les hanches, je jette un œil à la devanture avec scepticisme. Restaurant Dot’s Diner. Le plus intéressant reste forcément dans le fait qu’habituellement, on peut manger dans un restaurant - même si c’est pour moi qu’une notion vague que j’ai pu lire dans certains bouquins d’avant-guerre. Imaginer un lieu où les gens viennent manger sans se méfier de la compagnie des autres me semble impensable. C’est que la survie sur les terres dévastées a vite fait de défiguré toute notion d’entraide et de convivialité. Avec tous les prospecteurs qui rôdent à proximité de Jericho, par facilité, il a fallu qu’on s’éloigne un peu de la ville cette fois-ci. A croire que d’avoir vécu une bonne partie du mois à se démerder dans le désert nous a donné une sacré résilience et a balayé la peur comme si elle n’était qu’une vulgaire mouche envahissante. Je me gratte le crâne, ma chevelure emmêlée nouée sous une casquette pour me protéger du soleil ardent qui martèle. Avec les capsules qu’on a récupéré du maire de Jericho, on a pu se trouver un petit coin où crécher en ville et s’acheter de nouvelles frusques pour remplacer celles qu’on avait lorsqu’on est sorti de notre abri. Rien de folichon. Quand je pense que j’aimais bien coudre, j’ai remarqué que les gens se basaient surtout sur de la récup’. Comme si l’artisanat de ce côté là, avait été évincé pour donner priorité aux ingénieurs qui bidouillent les machines.
Mary se tortille derrière moi et finit par disparaitre derrière le bâtiment en m’informant qu’elle va au petit coin.

« Fais gaffe ! Attends, laisse moi d’abord sécuriser le périmètre. » Que je réplique d’un ton réprobateur. Avec tout ce qui rôde dans le coin, mieux vaut être prudent et je sais pertinemment que ma sœur ne l’a jamais été... Elle souffle, grommelle mais finit par attendre l’autorisation que je lui donne après quelques minutes. « Bon, tu cries si jamais tu vois quelque chose de louche, hein ? »

Elle se contente de me répondre par un long silence et je roule des yeux. Depuis qu’on est dehors, on est souvent d’accord sur rien, elle et moi. Le soir, alors qu’on se couche sur nos paillasses et qu’on essaie de fermer l’œil, il y a ce silence froid qui s’installe - celui qui nous pousse à réfléchir et à se souvenir. De nos parents. De notre abri. Il nous reste tout à découvrir et pourtant, j’ai cette tenace impression qu’on n’a plus rien.
Tandis que je fixe la carcasse nauséabonde d’un coyote rongé par les vers qui git sur le sol poussiéreux, la voix familière d’Alfie m’extirpe de mes pensées.

« Miss Sarah ! Est-ce bien raisonnable de vouloir rentrer là-dedans ? » Me demande-t-il sur un timbre neutre.

Depuis que River m’a aidé à le retaper, il est comme neuf et on l’a emmailloté dans du tissu pour éviter que le sable ne se glisse pernicieusement dans sa mécanique. Je me redresse en époussetant mes fringues et je me tourne vers lui, le regard dissimulé derrière des lunettes de soleil que je me suis procurée en ville.

« Alfie... Tu vas pas m’demander ça à chaque fois, si ? » Mon Handy a du mal à saisir dans quel monde sinistre on évolue. Lui aussi, a été auprès de nous dans l’abri, et même si mon père l’a reprogrammé pour qu’il soit capable de nous aider en temps voulu, il en reste pas moins un robot de maison. « Prépare le lance-flammes et aiguise ta scie ! »

Je lui lance ça sur le ton de la blague, mais mon robot est encore loin d’être apte à comprendre les nuances de timbre. J’esquisse un sourire, ma figure mordue par le soleil qui n’a cessé de me faire rougir depuis qu’on a mis le pied dehors. Je sens une goutte de sueur couler le long de mon échine et je me sers de ma main comme d’un éventail, au moins le temps que ma sœur estime en avoir fini. Lorsqu’elle revient vers moi, elle semble pressée et son visage est étrangement blême.

« Qu’est ce qu’il se passe ? » Que je lui demande, nerveuse, en l’empoignant par les épaules.

« Y a eu un mouvement là-bas. » Elle me désigne le bâtiment d’un doigt tremblant avant de reprendre. « Par la vitre à l’arrière. Sarah... On est vraiment obligé de rentrer là dedans ? »

Son ton est suppliant et je me sens à deux doigts de fondre d’inquiétude. J’ai la nette impression de ne pas avoir à faire ça - la forcer à venir avec moi. Et pourtant, je sais très bien que si je ne l’oblige pas à affronter ce genre d’évènements, elle sera incapable de se défendre s’il m’arrivait quoi que ce soit. Elle n’a que quatorze ans, et les jeunes filles de son âge devraient être en train de bosser leur bouquin d’histoire et apprendre les sciences plutôt que d’errer prés des ruines d’un restaurant en espérant y trouver quelque chose à becquer.
Je soupire longuement, me sentant accablée par le regard conjoint de Mary et d’Alfie.

« Bon d’accord, pour cette fois-ci, tu peux rester dehors. T’as qu’à faire la guet. » Je m’empare de l’arme à feu que j’ai coincé à ma ceinture et je me dirige vers la porte vitrée à moitié ébranlée de l’établissement.

Une belle journée ensoleillée en perspective… Comme toutes les autres, encore et toujours placées sous le signe brulant de l’astre lumineux, comme d’habitude, un jour où l’on est heureux de porter un chapeau. Péniblement, Loïc s’était levé avec la matinée, et, péniblement, il s’était trainé au son de son estomac creux dans l’immensité du grand rien qui restait de cet état. Quelle idée d’autant s’éloigner des endroits plus conventionnels de fouille ! Certes, il ne restait pas grand-chose là-bas, près des villes, enfin, de ce que les survivants osaient appeler ville –d’un certain côté, théoriquement, lui non plus n’avait jamais vu de grande ville d’avant-guerre encore en vie- mais au moins, on pouvait facilement dénicher de la nourriture, autant en y rentrant qu’en voyant passer des marchands.

Faut dire, aussi, ce n'était pas bien malin de prendre si peu de vivre avant de partir… Maintenant, il fallait espérer trouver quelque chose. Et justement, alors que le disque d’or s’élevait presque à son apogée dans ce ciel sans nuages, faisant couler quelques gouttes de sueur sur les tempes du survivant, sa bonne étoile le mena jusqu’à sa délivrance. Le Dot’s Diner ! Comment ne pas trouver quelque chose à grignoter dans un truc au nom pareil, hein ? Loïc leva la tête vers ce soleil qui le faisait bouillir depuis qu’il s’était levé, lui fit un petit sourire avant de lui jeter un « Merci, ma vielle ».

Prudence cependant, assez de conneries comme ça, vaudraient mieux pas tomber sur un groupe de raiders qui aurait décidé de loger ici. Après une brève inspection par les fenêtres, ça semblait bel et bien aussi désert que dehors en tout cas, hormis le cadavre dévoré par les vers du coyote –dommage, de la viande, ça lui aurait fait du bien…-, pas de signe de vie. Alors, plongeant la main dans la poche intérieure de son manteau, là où attendait l’arme qui n’avait presque jamais tiré qu’il s’était approprié en sortant de son abri, il poussa la porte et entra dans le restaurant en ruine. Il soupira de soulagement en constatant qu’il était vide, et plus frais que l’extérieur en plus. Partout, il y avait des tables retournées, brisées et tordues, entourées de ce qui fut des chaises. Mais, à quelques endroits, du mobilier avait survécu au passage du temps, quelques affiches poussiéreuses et décolorées, ici et là, une chaise qui patientait devant les trois quarts de sa table qui ne s’était pas effondré, quelques couverts éparpillés par terre et rouillés. Mais ce qui attira le regard avide de l’intrus, c’était cette porte battante au fond de la salle. Aucun doute : la cuisine était derrière.

Sans plus attendre, Loïc y pénétra pour découvrir le même état de destruction que précédemment. Les réfrigérateurs, pour la plupart, étaient défoncés, les plans de travail, sales et malodorants, étaient encombrés d’os ou d’autres choses en décomposition et les éviers semblaient bien trop rouiller pour fonctionner. Qu’importe, ça valait tout de même le cou de fouiller l’endroit ! Il se mit à ouvrir tout ce qu’il pouvait, à essayer de décoincer plusieurs pièces métalliques lui bloquant l’accès à d'autres contenants avant de finalement mettre la main sur une conserve de porc aux haricots et de sortir triomphalement une bouteille de vin toujours fermée. Dès son plus jeune âge, il avait été habitué à cette boisson, résidu des habitudes familiales. Il ne comptait plus le nombre de fois où son grand-père lui avait dit d’imaginer la saveur d’un de ces grands vins de France que le père du père du père (etc.…) de son père avait savouré dans sa vie.

Prenant la direction de la sortie pour se poser sur l’une des tables encore en parti debout et savourer sa trouvaille, Loïc se prit les pieds sur quelque chose, au sol, et s’écroula, lâchant nourriture et alcool qui allèrent, par chance, rouler sans se briser plus loin et tentant de se raccrocher à un tuyau proche. Celui-ci, corrodé après toutes ces années, céda et déversa, sous le nez du malchanceux, un reste d’eau croupie depuis des décennies. Avec un air de dégout, il s’assit en se retournant, découvrant un morceau de livre carbonisé où l’on n’arrivait guère plus qu’à lire le nom de son auteur, Voltaire. Qu’est-ce que ce truc fichait là ? L’homme savant n’en avait pas la moindre idée, mais se relevant en remettant son chapeau, il partit d’un léger rire.

-C’est la faute à Rouss…

Il se tut dans en sursautant. Non loin, une jeune fille cachée sous sa casquette pointait une arme sur lui. Loïc avait la furieuse envie de s’enfuir en courant, mais ses membres l’en interdisaient. Pendant un instant, toute logique l’abandonna, c’est étonnant de constater comment l’instinct de survie animal prenait le dessus sur l’esprit en cas de danger… Mais finalement, le sien revint et il mit ses mains bien en évidence. Lentement, il glissa sa main droite dans son manteau, attrapant son révolver par la crosse entre le pouce et l’index et le poussant sur l’un des plans de travail tout en brisant le silence.

-Doucement, je ne vous veux pas de mal. Regardez, je me désarme… Je vous assure, ça ne vous rapporterait rien à me tuer… Je peux vous aider peut-être ? Un peu de vin ?

Tandis qu’une goutte de sueur perlait sur sa tempe, il désigna d’un geste du menton la bouteille qui avait roulé à quelque mètre de lui. La jeune femme en face de lui était plutôt jolie, elle avait un teint assez clair, il n’arrivait pas assez à la distinguer pour voir la couleur de ses yeux, mais des mèches blondes dépassaient de sa casquette, et l’on ne pouvait pas vraiment apercevoir ses formes derrière ses vêtements amples. Il ne restait plus qu’à prier pour qu’elle ne soit pas une folle du fusil pour Loïc… Elle paraissait bien jeune pour une raider, mais ça n’empêche personne d’appuyer sur une détente… Et qu’est-ce qu’il en savait d’ailleurs ? Pas grand-chose à vrai dire.

A mesure que je m’avance, je sens l’angoisse me serrer le cœur. Et si une bande de raiders avaient élu domicile dans le restaurant ? Et si il y avait là-dedans un de ces super-mutants hargneux qui pourrait me briser en deux sans grande difficulté ? Mon souffle se bloque dans ma gorge et je pousse la porte qui émet un sinistre grincement. L’arme en pogne, je compte balayer la pièce principale plongée dans une semi-obscurité d’un simple regard mais un mouvement dans mon champ de vision attire brusquement mon attention. J’ai le palpitant qui s’emballe sans crier gare et je braque instinctivement le canon de mon arme à feu en direction de la silhouette prise sur le fait.

« On n’bouge pas ! » Que j’aboie avec hostilité.

Ces derniers mois passés dans les terres dévastées n’ont pas manqué de retournement et j’ai appris à me méfier, même des gueules les plus inoffensives. Je le vois se débarrasser de son arme à feu sous mes yeux en essayant de calmer le jeu. Il semble surpris et pas franchement dangereux, mais mieux vaut se méfier. A sa proposition incongrue, j’hausse un sourcil traduisant ma perplexité. Mon regard suspicieux alterne de la bouteille au visage de mon interlocuteur avant que l’on ne se toise respectivement. Il y a un moment de flottement, où le silence règne en maître des lieux, puis un bruit juste derrière moi m’arrache un sursaut. Mon arme m’échappe des mains et je fais volte-face vers Alfie qui se pointe d’un air innocent.

« Miss Sarah... Qu’est... ? » Mon robot s’interrompt en se rendant compte de la présence de l’individu aux paumes de mains levées. « Monsieur, qui êtes-vous ? Un charlatan ? Je ne vous laisserai pas faire de mal à... » Je ne le laisse pas finir, le repoussant quelque peu sur le côté pour me saisir de mon arme dans un grognement.

Pour l’effet menaçant, c’est tombé à l’eau. Déjà que je n’ai pas la gueule de ces raideuses à l’air farouches, mais alors avec Alfie à mes trousses qui sort ce genre de choses, pour sûr que personne ne me prendra au sérieux. D’un geste bref, je coince mes lunettes de soleil sur le sommet de mon crâne, offrant mes yeux plissés à l’inconnu qui reste immobile. Je garde mon arme que j’ai ramassé le long de mon flanc, évitant par la même occasion de le menacer directement tout en restant prudente. Je m’avance de quelques pas, jetant un œil à la fameuse bouteille mentionnée par mon interlocuteur. Du vin. Il me semble que c’est un alcool mais je ne suis pas sûre.

« Vous êtes un prospecteur, c’est ça ? » Que je lui demande finalement, un air blasé dépeint sur le visage. A chaque fois qu’on va dans un endroit, on y rencontre toujours quelqu’un - qu’il soit dangereux ou non. Le fait est que tous les endroits possibles ont déjà été pillés, ce qui est décourageant pour des gens qui essaient de survivre dans notre cas. « Si vous n’comptez pas nous faire du mal, alors je ne vous tuerai pas. Alors gaffe à ce que vous faites. »

Je braque sur lui un œil venimeux, comme pour l’avertir du jusqu’où je serai capable d’aller si il m’y pousse. Puis, je m’avance encore un peu, réduisant la distance qui nous sépare tout en parcourant l’endroit du regard.

« Vous êtes tout seul ? » Sur les terres dévastées, le nombre est synonyme de force. Ça, les raiders l’ont bien compris. Pas un seul bruit n’émane du reste de l’endroit - ce qui me conforte dans l’idée que l’on ne court pas un grand danger. Je soupire, rassurée avant de faire porter ma voix d’une main en cône. « C’est bon Mary, tu peux venir ! »

L’homme est circonspect, ce que je peux comprendre. Ma jeune sœur ne tarde pas à passer la tête par l’entrebâillement de la porte avant de considérer d’un œil intrigué l’individu qui nous fait face. D’ailleurs, là où je suis, je peux distinguer les traits de son visage. Il a un air sympathique, pas franchement bravache.

« C’est quoi votre nom ? » Que je lui demande en le détaillant ostensiblement de la tête aux pieds. Je suis toujours curieuse de savoir l’histoire des gens que je croise et qui ne veulent pas me faire la peau. Il semble être un baroudeur, tout comme nous. « C’est dangereux de se balader tout seul dans un monde pareil, vous ne croyez pas ? »

Un peu plus et l’on pourrait croire que j’essaie de l’intimider. Mais il n’en est pourtant rien. Je suis curieuse, voilà tout.

Silence puissant. Silence assommant, où seuls les battements rapides de son cœur émettaient un son sourd aux oreilles de Loïc. Qu’aurait-il pu faire d’autre ? Sortir son arme et tenter de tirer et se faire trouer par la même . Ou fuir en courant vers la porte et donc l’endroit où la jeune femme était ? Les questions, ça fuse tellement vite… Aussi vite que ces battements de cœur sur lesquelles on aurait pu danser un tango endiablé. En tout cas, la petite blonde avait l’air d’hésiter, avec un peu de chance, il pourrait s’en sortir sans trop de plaies. Mais voilà qu’une nouvelle chose entrait dans les donnés, une masse informe de tissue prime abord apparu dans la pièce, faisant apparaitre une moue interrogatrice et surprise sur le visage de Loïc, et faisant sursauter celle qui le tenait en joue, qui en perdit son arme. Soulagement : elle devait être aussi à cran que lui. Mais soulagement vite effacé, ce n’était rien de moins qu’un robot qui s’adressait à lui maintenant, un robot qui avait bien l’air d’appartenir à la femme qui ramassait son arme. Pas commun, il faut l’avouer.

Finalement, l’atmosphère se détendit alors qu’elle replaçait son arme et qu’elle s’approchait suivie de son garde du corps métallique. Sarah –en tout cas, c’était comme ça que son robot l’avait appelée- laissa voir ses yeux aussi bleus que ce ciel sans nuages qui persistait au-dessus d’eux, elle finit par prendre la parole, laissant s’échapper diverses questions. En tout cas, maintenant, Loïc pouvait baisser les mains, il en profita pour épousseter son manteau, sali par sa chute précédente, avant de répondre.

"-Hum… Moui… Oui, un prospecteur, on peut dire ça."

Loïc lança un nouveau coup d’œil sur le Mr Handy qui accompagnait Sarah. Il pourrait peut-être bien récupérer des pièces électroniques sur lui… Ou même la tuyauterie, ça devait être assez solide pour certaines parties du moteur qu’il avait plus ou moins en tête. Du coup, dire qu’on farfouillait partout pour trouver des technologies assez avancées ou des données pour l’aider dans sa quête étoilée, ce n'était pas forcément très malin. Après la rassurante assertion de son interlocutrice, Loïc reprit, en ramassant lentement, encore entre le pouce et l’index, son arme pour la remettre à sa place.

« -Je la remets à sa place, vous permettez ? J’ai pas l’intention de vous faire du mal, ni à vous, ni à ton robot. Vous avez faim ? J’ai trouvé ce truc, on devrait en trouver encore en fouillant un peu plus… »

Il avait terminé en rattrapant sa boîte de porc aux haricots tout en reprenant la vieille bouteille de vin, qui ne devait plus être que de la mauvaise gnôle maintenant, mais pour qui n’avait jamais vraiment gouté de bon vin, quelle importance ? La petite semblait tout de même sérieuse en donnant ses intentions, et il valait mieux ne pas la contrarier, surtout avec un robot qui la surveillait… Mais comme pour rajouter à l’incongru dans cette scène de hasard qui l’était déjà bien assez, un nouveau nom fusa. Que serait-ce cette fois ? Un cyberchien ? Un radcafard ? Plus étonnant encore… Une fille de pas plus d’une quinzaine d’années, moins, certainement. Une gosse aussi jeune et aussi loin d’une ville, ça rappelait de mauvais souvenir à Loïc, finalement, le robot n’était pas de trop dans ce trio. Maudite mémoire, il suffit de l’apparition d’une gosse comme d’une grive dans le ciel pour que le temps perdu soit retrouvé ! En tout cas, des présentations s’imposaient.

« -Loïc Apollier, enchanté. Sarah, Mary et, Euh… Mr Handy, je présume ? Joli robot, c’est pas courant d’en voir un comme ça qui se balade dans les terres dévastées. Comment vous l’êtes-vous procuré ? Ça m’intrigue… » Peut-être que là où le robot était, d’autres choses plus intéressantes attendaient, comme des turbopompes par exemple, ou des manuels détaillés pour l’aider. « C’est sûr, pour ça que je préfère ne pas trop m’éloigner des villages et des villes d’habitude, mais il vaut mieux être seul qu’en mauvaise compagnie dans un endroit pareil, n’est-ce pas . »

Loïc lança un bref regard sur la plus jeune et, dans un petit soupir, tendit sa boîte de porc aux haricots à la plus âgée. Mais comment elle pouvait lui remémorer ce gosse qu’il n’avait même jamais vu ?

« -Tenez, prenez. Je trouverais bien autre chose, je crois avoir vu un paquet pas trop abimé de nouille dans le placard où je l’ai trouvé… Mais, dites-moi, et vous, qu’est-ce que vous faites aussi loin de toute civilisation ? Autant parler un peu, c’est toujours mieux que s’entre-tuer, hein ? »

Dans les terres dévastées, on y fait son lot de rencontres, mais je pense pouvoir dire que je préfère largement quand ça se passe comme ça plutôt que de me retrouver à devoir griller un super-mutants de deux mètres de haut. Alors que mon interlocuteur reste dans le vague lorsqu’il acquiesce au sujet de la prospection, je le fixe avec défiance. Qu’est ce que ça veut dire, « on peut dire ça » ? C’est pas le genre d’approbations qui me rassurent, mais je vais me contenter de rester à bonne distance quand même - au cas où il veuille retourner sa veste. Je saisis son regard lorsqu’il s’étonne de la présence d’Alfie à mes côtés. Faut dire que je suis habituée à ce genre de réactions. Les robots, c’est clinquant. ça attire l’œil... Et les envieux. Une petite moue vient se dépeindre sur mes lèvres jointes et à sa gestuelle pour rengainer son arme, je referme légèrement la prise sur la mienne. Je reste immobile mais c’est un accord qui s’installe de par l’échange d’un regard. Il assure ne pas vouloir nous faire du mal, mais évidemment qu’ils disent tous ça, au début. Alors que l’homme se détend pour mettre la main sur une boîte de conserve et la bouteille qui a roulé par terre, je le suis d’un regard inquisiteur. Je commence à m’avancer en jetant quelques coups d’œil furtifs aux alentours, essayant de repérer le truc qui pourrait être comestible mais ma prudence revient au galop quand l’homme reprend la parole. Il se présente sous le nom de Loïc Apollier et se montre très attentif lorsqu’il énonce mon nom et celui de ma sœur. Tandis que son attention se porte sur mon robot, je plisse les yeux et je fais un pas pour me mettre devant ce dernier comme pour le protéger d’une attaque éventuelle.

« Oui, il intrigue beaucoup de monde Alfie. » Que je lui lâche sur un ton sec. « Il n’est pas à vendre, ni à piller. »

Je ne compte pas le nombre de personnes qui a voulu en apprendre un peu plus sur l’endroit où nous vivions avant. Le fameux abri, où nos parents y sont restés. Une fois de plus, je me sens incapable d’échapper aux questions et je préfère même prendre les devants.

« On était dans un abri... Indépendant. Mais il n’y a plus rien aujourd’hui, excepté une bande de raiders mal intentionnée. » Je ne vais sûrement pas ajouter que je considère Alfie comme mon meilleur ami - normal lorsqu’on vit depuis sa naissance qu’en compagnie de sa seule famille en pensant qu’il n’y a pas de survivant dehors. Sa petite remarque sur le fait d’être seul plutôt que mal accompagné me fait plisser à nouveau les yeux. « En effet... »

En espérant simplement que lui, ne fasse pas partie de ce qu’on considère être une mauvaise compagnie. Il n’a pourtant pas du tout la tête de quelqu’un dont on serait amené à se méfier. Et c’est bien ça qui maintient sur mes gardes. A croire que je suis devenue complètement parano depuis qu’on a mis le pied dehors et découvert ce monde qui ne se borne à aucune règle. Quoiqu’il en soit, Mary semble suscité en lui un étrange sentiment... De charité. J’ai remarqué que la plupart des gens que j’ai pu croiser nous ont porté secours, et je suis persuadée que la présence de ma jeune sœur à mes côtés est une des raisons qui les y ont poussé. A croire que les gens ne sont pas tous devenus sans cœur.
Quand il me tend la boite de conserve, je l’observe avec défiance avant de m’en saisir et daigner me dérider un peu. J’étire un petit sourire et le gratifie d’un geste de tête.

« Il est bizarre votre chapeau... » Commente Mary avant de s’approcher et tendre le menton comme si un lapin allait sortir d’en dessous.

Elle a cette spontanéité et cette curiosité que je lui envie. Mais bon, faut bien que quelqu’un veille au grain, même si Alfie sait se montrer rabat-joie quand il veut. Il nous interroge sur notre présence dans un coin si reculé et je m’attèle à ouvrir la boite avant d’y plonger un doigt et goûter la sauce. C’est fou ce que tout ça a comme goût comparé à ce que notre père nous faisait manger dans notre abri. Je la fais passer à ma sœur avant de reporter mon regard sur notre interlocuteur fort curieux.

« On fait comme tout le monde... On essaie de survivre. » Que je lui dis de manière concise avant de soupirer et reprendre avec un peu plus de bonne volonté. « On était dans cet abri depuis notre naissance. On était persuadé qu’il n’y avait pas de survivants là-dehors, jusqu’à ce que cette bande de raiders nous attaque. »

Je me rappelle qu’au début, j’osais raconter les détails sans que quiconque ne les demande. Mais plus le temps passe, et plus j’ai du mal à parler d’eux. Nos parents, qui nous ont fait avaler ce mensonge depuis vingt ans. Je mentirai si j’affirmai qu’il ne me manquent pas, mais je préfère les garder au fin fond de ma tête - sans pour autant ressasser tous les torts qu’ils ont eu.

« Et vous ? Pourquoi vous êtes tout seul ? Vous n’avez pas de famille ? » Facile de poser la question alors que je suis en présence de ma sœur. ça me semble impensable d’affronter ce monde tout seul. Et pourtant, faut croire que Loïc est du genre solitaire - bien que fort aimable.

Tout en lui posant cette question, je fais le tour du propriétaire, jetant un œil à tout ce que je pourrais trouver d’utile. Faut dire qu’on n’est pas venu là pour rien.

Sur plusieurs points, la jeune Sarah semblait tiquer ou bien suspicieuse, mais, comment lui en vouloir dans un monde aussi dégénéré ? Par bonheur, les deux gens armés semblaient s’être accordé sur le point de ne pas s’entre-tuer, c’est déjà beaucoup, dans les terres dévastées. Loïc ne devait pas être le premier à parler de ce robot en tout cas, étant donné la réaction protectrice que son évocation engendra chez l’interlocutrice suspicieuse. Il comprit vite que ce n’était pas un point à prendre à la légère, s’il ne voulait pas voir les choses dégénérer, il vaudrait mieux ne pas trop s’appesantir sur le sujet –une balle tirée par une jeune femme à peine sortie de l’adolescence tue aussi surement qu’une tirée par un homme dans la force de l’âge, enfin, par lui-même à tout le moins-. Aussi, entreprit-il de rassurer la méfiante Sarah au plus vite.

"-Alfie ? Joli nom, c’est vous qui l’avez donné ? Ne vous inquiétez pas, je n’ai ni l’intention de l’acheter, ni de le piller, je n’y n'aurais pas grand intérêt."

Mais voilà qu’un élément nouveau s’intercala dans la conversation, un abri indépendant ! Un véritable miracle ! À coup sûr, on pourrait y trouver quelque chose d’intéressant, il devait y avoir plein de composant électronique de rechange, des salles bourrées d’outil qui pourraient se montrer utile, et, avec de la chance, quelques bouquins au sujet si merveilleux de ces voyages spatiaux dont on ne parle plus. Enfin, seulement si la propriétaire du robot mentait au sujet de ces raiders… Toujours la fâcheuse habitude de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment ceux-là, de vraies vermines. Quitte à ne plus trop parler du Mr Handy, autant approfondir au sujet de cet abri…

"-Tien donc, un abri indépendant ? Vous aimez l’originalité vous ! Je sors moi-même de l’abri 32, c’était plutôt tranquille comme vie… Mais vous êtes sûre qu’ils y sont restés s’il n’y a plus rien de valeur ?"

Le don de la boîte de conserve semble plaire cependant, dommage pour le grogneur dans son estomac… Enfin, dans un restaurant, on devait bien trouver de la nourriture en plus grande quantité qu’une simple boîte de conserve. À l’assertion de la plus jeune des deux filles, Loïc sourit, vraiment, il ne savait pas pourquoi, mais il se sentait presque responsable de cette gosse qu’il ne connaissait même pas… Peut-être était-ce là la volonté de se racheter ? Tellement stupide… Il n’aurait rien pu faire de toute manière… Mais il semblait bien qu’il n’arrivât pas à lutter contre sa propre culpabilité.

"-D’avant-guerre, petite, tout droit sorti d’un atelier de haute couture de Paris. On en a toujours pris soin dans la famille, si tu veux, je peux te le prêter un peu." Il accompagna la parole de geste en retirant son chapeau et en l’approchant de Mary, découvrant ses cheveux bruns courts et coiffés en arrière.

Étrange histoire que celle recomptée ici. Ces filles et ce rebot devaient être fort chanceux ou bien fort talentueux s’ils avaient réussi à s’échapper lors d’une attaque de leur abri ces raiders. Mais si celles-ci se retrouvaient seules aussi loin d’une ville, ce devait être parce que leurs parents n’avaient pas été aussi chanceux…

"-Désolé pour les raiders. Il suffit toujours d’une petite catastrophe pour que les pires rejetons de l’humanité s’amusent à foutre un bordel monstrueux. Parfois, je me dis qu’il aurait mieux valu qu’un tas de survivants ne le soient pas et qu’un tas de mort le soient, eux… "

Loïc avait commencé à fouiller dans quelques placards pour trouver autre chose à manger ainsi que des contenants pour verser le vin en prononçant ses dernières phrases. Mais, à l’évocation de sa famille, il eut une légère moue mélancolique qui s’effaça rapidement.

"-Les gens de ma famille sont tous partis loin… On n’était pas vraiment très sociable, ni très apprécié, dans l’abri 32, alors je présume que je suis seul par habitude maintenant. Et puis, je t’avoue que je ne suis pas sorti depuis si longtemps que ça de cet abri, et qu’il n'y a pas grand monde qui veuille en sortir pour accompagner un type comme moi. Et vous, vous paraissez bien jeune tout de même, vous n’avez plus personne pour s’occuper de vous ?"

Loïc allait reprendre ses fouilles quand son regard porta sur un réfrigérateur vieillot. Une soudaine idée lui apparut en tête, avec des souvenirs de cycle thermodynamique. Il a toujours existé plusieurs moyens d’obtenir l’aide ou des informations d’une personne, être sincèrement on en faisait partie.

"-Dites-moi, peut-être avez-vous entendu parler de la thermodynamique et des premier et second principes ? Ils sont à la base du fonctionnement d’un réfrigérateur, où on crée un cycle sur lequel le liquide réfrigérant capte l’énergie thermique à l’intérieur de la machine. Et, justement, dans ce cycle, il faut, à un moment, augmenter la pression. Les Mr Handy utilisent un moteur à air comprimé, c’est pour ça qu’ils flottent sans faire trop de bruit et un compresseur, c’est pas si gros, aussi haut et large qu’une main environ. Vous feriez peut-être mieux de garder un compresseur d’un de ces réfrigérateurs en pas trop mauvais état, comme ça, s’il arrive un coup dur à Alfie, vous aurez toujours de quoi remplacer au moins cette pièce en bidouillant un peu."

Alors, Loïc parti vers l’un des engins et entreprit de le faire tourner difficilement pour trouver l’un desdits compresseur qui pourrait avoir tenu le coup.

"-En général, ça ressemble à des boitiers noirs en forme de cylindre au bout arrondi, si vous en voulez. Oh, et, je ne sais pas si vous le saviez, mais les Mr Handy peuvent aussi condenser l’humidité de l’air pour vous fournir de l’eau pure de temps à autre. Si son condenseur n’est pas abimé… S’il l’est, vous pouvez toujours récupérer l’un de ceux de ces réfrigérateurs, ce sont les longs tuyaux en zigzag derrière lui, je crois qu’avec l’aide du robot, vous pourriez redonner une forme adaptée au condenseur, si vous en avez besoin un jour."

HRP:

Même si je préfère rester sur mes gardes, je ne peux ignorer les efforts du dénommé Loïc pour nous rassurer. Si ce n’est pour « me » rassurer en réalité, car Mary a vite chasser tout soupçon du moment où elle a remarqué le chapeau de ce dernier. Je décèle l’étincelle de surprise et de curiosité lorsque j’évoque l’abri qu’on a quitté et j’en garde un demi-sourire lucidement cruel. Et non, il ne doit pas rester grand chose de notre petit havre de paix. L’homme nous informe venir lui aussi d’un abri, le seul communautaire existant encore à l’heure actuelle. L’abri 32. On en a souvent entendu parler mais j’ai cru comprendre que la hiérarchie et le fonctionnement de cet endroit avait de quoi rendre dingue. Au moins, ces gens là semblent civilisés - pas comme ces raiders qui massacrent des gens sans le moindre état d’âme. A sa question, je soupire tristement.

« Non il ne reste plus rien. » Ou peut-être les deux corps en partie putréfiés de nos parents... C’est le genre de chose à laquelle je pense souvent mais je ne vois aucun intérêt à le formuler à voix haute. « Vous sortez vraiment de l’abri 32 ? C’est vrai que ça semble plausible. »

Je le détaille ostensiblement de la tête aux pieds et lui accorde un sourire. Pendant ce temps, ma sœur me fait distraitement passer la boîte de conserve pour s’approcher de Loïc, intriguée par son couvre-chef qui sort de l’ordinaire. Je leur jette un œil vague, m’appuyant contre une table pour apaiser la faim qui me tenaille les entrailles. La sympathie de l’homme ne fait aucun doute, surtout lorsqu’il visse son chapeau sur le crâne de Mary qui s’en va en quête d’un des miroirs accrochés aux façades d’entrée. Face à la légèreté de la situation, je ne peux m’empêcher de secouer la tête d’amusement. Je pourlèche mes doigts tâchés de sauce avant de croiser le regard de mon interlocuteur.

« C’est sûr que ça nous a fait un choc. Déjà d’apprendre qu’il y avait des survivants, mais surtout qu’ils ne nous voulaient que du mal. » C’est un genre de bonne grosse désillusion qui marque pour la suite des évènements - qui vous force à vous méfier de la moindre personne, armée ou non.

L’on aimerait probablement tous que les choses soient autrement. Que l’humanité apprenne des leçons donnés par un monde ravagé par leur bêtise. Et pourtant, il semblerait que ce soit toujours la même rengaine. A l’entendre mentionner vaguement sa famille, je fronce les sourcils entre curiosité et incompréhension. « Partis loin ? » Est-ce une autre manière pour dire qu’ils sont morts ?

« Il me semblait que les gens de l’abri 32 n’ont pas le droit de sortir, c’est pas vrai ? J’ai entendu dire ça... » J’hausse les épaules avec nonchalance.

Comment peut-on préférer vivre seul dans un monde aussi hostile ? J’me dis que Loïc a l’air d’être quelqu’un de particulièrement sociable et pas le genre de type qui passe son temps à se cacher comme le ferait un ermite. Quand il nous retourne la question au sujet de la famille, je saisis le regard fuyant de ma sœur qui préfère siffloter en s’admirant dans le miroir. Je baisse les yeux, laissant un bref silence s’installer entre nous, puis je trouve le courage de répondre.

« Nos parents sont morts. Tués par les raiders qui ont pénétré dans notre abri. On a réussi à s’enfuir toutes les deux. C’est tout. » Mon ton se fait sûrement un peu bref, tant je n’ai pas envie de m’attarder sur le sujet. D’ailleurs, je tique au sujet de ce qu’il a dit un peu plus tôt, et je me mets à le dévisager avec curiosité. « Pourquoi personne ne voudrait accompagner quelqu’un comme vous ? Vous m’avez l’air d’être un type bien. »

J’observe Loïc s’approcher du réfrigérateur et je lui coule un regard circonspect tandis qu’il se livre à quelques explications physiques sur le fonctionnement de la machine. J’acquiesce brièvement à ses dires, ayant surtout été confrontée aux pièces classiques ramenées par mon paternel lorsqu’il bidouillait Alfie.

« Mon père m’a appris la maintenance robotique mais j’ignorai que c’machin là contenait ce que vous dites. » Je m’approche de lui pour lui filer un coup de main, délaissant ainsi la conserve sur l’une des tables. « Vous êtes malin. C’est dans votre abri qu’on vous a appris ça ? » Un endroit qui ne semble pas être trop mal, même si je me sentirai incapable de me sentir enfermée entre quatre murs à nouveau. J’écoute attentivement ses instructions et l’aide à ouvrir la machine pour en récupérer l’élément concerné.

Penchée sur le réfrigérateur, je ne me rends pas tout de suite compte du grésillement suspect qui s'approche des portes du restaurant. C'est Mary qui semble sur ses gardes, elle qui se trouve à proximité de l'entrée. Elle articule mon nom dans un murmure paniqué et je daigne me redresser au moment où les portes s'écartent sur une silhouette en armure dont je n'ai encore jamais vu la configuration. Ma main se porte instinctivement à mon arme et j'échange un regard à Loïc, attendant de voir la réaction qu'il compte adopter.

« Euh.... » N'ayant pas l'air franchement agressif, j'écarte lentement la paume du revolver avant de demander à haute voix. « Bonjour... D'où vous venez comme ça ? »

Si ça peut sembler bête, la question mérite d'être posée. L'individu claquemuré dans sa carapace semble nous lorgner à travers sa visière, puis il s'approche comme s'il était à la recherche de quelque chose. Il porte un logo sur le poitrail, le signe que je crois deviner être celui qui s'apparente à la Confrérie de l'Acier. Je ne sais pas grand chose de ces gens-là - juste que la technologie est leur sainte motivation dans les terres dévastées.

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'PNJ en bâtiment' :

Remarque technique:

Tout en continuant à démonter ce qui pouvait être sauvé des débris de l’ingéniosité humaine, Loïc entreprit de maintenir la conversation en répondant quelque peu en différé à ce qui avait été dit. Les pauvres petites avaient passé la majorité de leur vie à croire qu’il n’y avait plus rien sur le monde… Mais, pire, il semblait que leur abri était bel et bien vide désormais. Un bon filon qui s’envolait… Mais Loïc ne voulait pas abandonner là, d’autant que ce n’était pas courant de se retrouver en compagnie aussi sympathique dans ce désert.

« -Tu sais… Hum, désolé, je peux te tutoyer ? Il y a tout un tas de choses qui ont bien plus de valeur qu’on ne le croit, la preuve en est de tous ces composants que je t’ai décrits. On peut récupérer beaucoup de choses dans un système d’aération, de pompe à chaleur, ou dans un ordinateur, même s’il ne fonctionne plus. Tu te souviens pas d’un système qui n’avait pas l’air trop abimé ? Peut-être que ça pourrait quand même m’intéresser…
Sinon, oui, je viens vraiment de l’abri 32, enfin, faut dire que si j’y vivais seul avec ma famille, ça n’aurait pas changé grand-chose je crois. En fait, le problème, c’est pas d’en sortir, c’est plus le côté définitif de la chose. Maintenant que je suis dehors, c’est comme si je n’avais jamais été dedans. »

Loïc fit une pause le temps de dévisser quelque chose dans la pénombre des entrailles du réfrigérateur avant d’enlever son bras, bredouille, ayant apparemment abandonné sa cible.

« -Désolé pour tes parents, je m’en doutais, je n’aurais pas dû te demander. Et je compatis, a n’a pas dû être simple quand tu as découvert les ruines de nos civilisations, la der des ders… Tu parles, ça a recommencé et ça recommence toujours, même maintenant qu’on a presque tout détruit. Mais je suis certain que tu pourras trouver quelques gens encore sensés ici, et sinon, tu as toujours Alfie.
En fait, qu’importe l’homme, c’est le nom qui compte. Enfin, c’était, dans le monde civilisé d’avant. Et dans le début de l’abri, le parent de mes parents était plutôt isolé, il parlait très mal la langue, c’était comme son talon d’Achille. Du coup, ça nous a suivis tout le long de notre évolution dans l’abri, ça, et le fait que les gens pensent que je les prends pour des idiots quand je me mets à leur expliquer des choses un peu compliquées… Du coup, quand je suis parti de l’abri, il y avait personne pour venir avec moi, et en dehors, j’ai pas trop la tête du gars qu’il faut suivre pour survivre. Donc, je voyage seul, depuis quelque temps déjà. »

Alors qu’enfin, aidé des mains plus fines de la jeune Sarah, Loïc parvint à retirer un petit boité noir cylindrique pas trop amoché de la partie inférieur du réfrigérateur, il reprit son souffle avant de terminer.

« -Je crois que tu peux te considérer comme l’une des plus savantes de ce désert si tu sais maintenir un robot, les gens ont presque tout oublié en quelques siècles… C’est bien dans mon abri que j’ai tout appris, ouais, mais je doute qu’il y ait grand monde là-bas qui en sache autant. C’est mon grand-père qui m’a presque tout appris, c’est de famille, ça aussi. Je peux dire que je me débrouille bien en physique ou en chimie, que ce soit en thermodynamique, en mécanique du solide ou du fluide, en électromagnétisme, optique ondulatoire et géométrique, chimie organique, pyrométallurgie, hydrométallurgie, et astrophysique. Quand on sait le pourquoi du comment, ça devient beaucoup plus simple de comprendre le fonctionnement de tout ce qui est d’avant-guerre. »

En fait, les choses se passaient beaucoup mieux que Loïc aurait pu le supputer. Les étoiles étaient de bien mauvaises interlocutrices, et ça lui faisait du bien de retrouver le contact humain. Il se montrait peut-être imprudent en ne voyant guère de menace devant ces autres voyageurs, mais leur âge jouait en leur faveur. Enfin, les choses se passaient bien, avant que Sarah, alertée par sa sœur, ne se redresse en sursaut, portant instinctivement sa main à son arme. Loïc pivota sur lui-même, la main prête à plonger dans la poche intérieure de son manteau, mais il stoppa net son mouvement en voyant ce qui était entré dans la pièce tout en jurant.

«-Bordel de putain de merde de Nom de dieu ! »

Il y eut un silence lourd après que Sarah ait posé sa question, peut-être que les personnes en armure assistée en face d’eux les regardaient avec étonnement… Mais, finalement, le silence prit fin avec la voix grésillant derrière son casque de l’un des nouveaux arrivants.

« -Capitaine, qu’est-ce qu’on fait d’eux ? Vous pensez qu’ils sont là pour la cache de contrebande ? »
« -Ils n'ont pas l’air d’être une menace, pas la peine de faire du grabuge. » Il fit un signe de la tête en direction de Loïc. « Vous, là, vous êtes le père des deux jeunes ? Le grand frère ? Dites-nous d’abord pourquoi vous êtes ici et qui vous êtes, on verra après. »

Loïc poussa un petit soupir de soulagement. Sa dernière rencontre avec les types de la confrérie c’était pas vraiment bien passée, surtout pour la confrérie, alors qu’on ne le reconnaisse pas et qu’il ne soit pas tombé sur la même patrouille –ce qui aurait peu ou prou signé son arrêt de mort pensait-il-lui retirait un énorme poids sur l’estomac. Enfin, il valait mieux ne pas se faire plus d’ennemis parmi ces dingues de la technologie qui pensaient que tout leur revenait de droit.

« -Je suis juste un voyageur qui a vu l’enseigne d’un restaurant et qui espérait y trouver à manger, j’ai vraiment pas la moindre idée de quoi que ce soit, je vous l’assure. Et les deux filles, elles sont avec moi, elles n’ont rien de dangereux. »

Encore ce foutu sentiment de responsabilité… Il voulait aider les deux sœurs en les sortant de l’équation, ce ne serait pas trop efficace à ce qu’il pensait, mais c’était toujours mieux que rien. Ce fut à ce moment que le chevalier capitaine sembla remarquer Alfie, il le désigna du menton, prenant une voix plus suspicieuse avant de reprendre la parole.

« -Attendez, c’est un robot en état de marche ça ? » Il leva une arme en direction de Loïc. « Dites-nous qui vous êtes pour en avoir un, comment vous vous l’êtes procuré et si vous saviez quoi que ce soit au sujet de cet endroit, et pas d’entourloupe ou ça va mal se finir ! »

Je trouve la nature humaine fascinante, moi qui me suis toujours contentée de l’imaginer - bornée à croire qu’on était les seuls sur Terre. Quand j’y pense, c’est stupide, et j’ai été bien trop naïve... Tout ce temps. A chaque nouvelle physionomie, je ne peux pas m’empêcher d’observer, d’analyser, quitte à paraître trop insistante. C’est une chose que j’ai du mal à brider chez moi, après avoir passé les vingt premières années de ma vie en compagnie de mes parents et de ma sœur, que de m’ébahir sur les variétés faciales que l’on peut croiser. Quand je m’échine à aider Loïc à récupérer les pièces du réfrigérateur, je lui jette quelques coups d’œil inquisiteur avant d’accéder à sa requête par un petit sourire. De toute manière, je ne suis pas franchement habituée à vouvoyer les gens tant j’ai eu de rares occasions d’en côtoyer alors au final, ça m’arrange. Je songe à ce que me dit Loïc au sujet de son abri et au côté définitif d’en sortir, et je me heurte à une incompréhension mutique. Pourquoi donc séquestrer ces gens-là ? Après tout, les radiations sont certes dangereuses, mais depuis que moi et Mary sommes sorties de l’abri, il ne nous est pas poussé des tentacules sur le front. Se pourrait-il qu’ils vivent dans la même illusion que nous au tout début ?
Lorsqu’il s’excuse pour m’avoir amené à parler de nos parents, je hausse les épaules avec nonchalance. « C’est pas grave. Tu pouvais t’en douter mais pas savoir. » Il se montre compatissant face à notre découverte et je me fends d’un petit sourire. « Evidemment, on est un peu déçu de voir que finalement rien n’a changé par rapport aux bouquins. » Pas d’utopie dans ce que j’ai pu lire dans les quelques romans ou ouvrages historiques. Les humains sont sans cesse en train de se tirer dans le pied, malgré tous les rappels à l’ordre. Ils sont voués à s’entretuer et à anéantir la terre sur laquelle ils marchent. « Oui, Alfie est un peu mon meilleur ami, même si c’est bête à dire, j’le conçois. » Et pourtant, les intelligences artificielles ne sont-elles pas plus sincères et donc « meilleures » que les hommes et leurs prédispositions à mentir et établir des stratagèmes pour parvenir à leurs fins ? Loïc m’explique que tout le monde dans l’abri le considérait comme un être quelque peu condescendant, faute à une éducation manquée il y a des générations de cela qui le rendait plus malin que les autres - et donc forcément incompris. C’est vrai qu’il a l’air de s’y connaitre, et d’être quelqu’un de curieux. Au final, il semblerait qu’on ait quelques points en commun lui et moi. Quand il me confie que je dois être une des plus savantes des terres dévastées car je suis en possession d’un robot, je lui laisse le bénéfice du doute même si l’idée puisse m’amuser. « On peut dire que notre père était scientifique... Même si au final je n’ai jamais su le fin mot de ce que nos parents ont fait ou vu avant de se retrouver dans notre abri... » Car oui, c’est là que réside tout le mystère de l’histoire. Si nos parents nous ont menti sur la civilisation extérieure, c’est sûrement pour une raison qui leur semblait valable. Là est le plus inquiétant au final.

Dés lors la troupe de confréristes passe le seuil de la porte que la tension devient palpable dans le restaurant. J’ignore ce qu’ils veulent mais je n’aime pas trop cette manière assez inhumaine qu’ils ont de réagir. Leur croyance toute entière est régie par la technologie, alors que vaut quelques vies humaines pour ces gens là ? J’attrape ma sœur par le bras pour la rapprocher de moi, méfiante, et la réaction de notre comparse ne me rassure en rien. Les différents protagonistes en armures s’adressent alors la parole comme si on ne pouvait pas les entendre et j’échange un regard perplexe avec Loïc. La cache de contrebande ? Voilà de quoi piquer notre curiosité au vif. Evidemment que nous ne sommes pas là pour ça, mais maintenant qu’ils l’ont évoqué, j’aimerais beaucoup savoir de quoi il s’agit. L’un des soldats daigne finalement s’adresser à nous pour nous questionner sur nos identités. Les appréhensions d’Apollier étant largement perceptible, je me demande bien quels problèmes il a pu avoir avec les confréristes pour être amenés à les craindre de la sorte. Il prend néanmoins la parole pour nous deux en prenant toute la responsabilité nécessaire et assure que nous n’avons rien de dangereux. Evidemment.

« On avait faim m’sieur, voilà tout. » Que j’ajoute, les bras dans mon rachis. Nos deux têtes blondes inquiètent rarement les gens qu’on croise. Puis, l’homme en armure semble s’intéresser à Alfie, le détaillant ostensiblement de la tête aux pieds - si toutefois il en avait - pour nous interroger sur sa provenance. Mon cœur se met à battre la chamade quand je comprends l’intérêt qu’il représente pour eux. Alors que le type se met à menacer Loïc de son arme, je m’avance dans sa direction en levant les paumes de main au ciel. « Hé ho ! Doucement, s’il vous plait. Ce robot est à moi. Il a été programmé par mon père et est c’est tout ce qu’il me reste de lui aujourd’hui ! » Que je réplique d’un air prétendument contrit. Ca fait partie du plan, jouer sur les émotions, pour qu’ils nous lâchent la grappe et qu’on puisse filer sans embuche.

#Lancer de dé :
REUSSITE : L’escouade se montre compatissante.
ECHEC : Ils veulent s’approprier le robot.

L’homme semble mûrement hésiter, le canon de son arme toujours braqué en direction de Loïc. Puis, dans un soupir, il se met à marcher en direction d’Alfie qui se tourne vers moi d’un air sûrement effaré.

« Messieurs, ma propriétaire est bien lady Sarah. Son père m’a programmé pour la protéger quoiqu’il advienne. » Ose la voix robotique avec diplomatie.

Je sens une sueur froide me faire frémir l’échine, et mes poings se serrent à mesure que le capitaine s’approche de mon Handy.

« Je suis désolé mais on va devoir vous le confisquer mademoiselle. » Tranche finalement l’homme derrière son casque qui nous empêche de percevoir la moindre de ses expressions.

Mon sang ne fait qu’un tour dans mes veines et je m’avance en direction du gradé, ne sortant pas mon arme pour autant.

« Non ! Vous n’pouvez pas faire ça ! C’est mon robot ! » Que je l’interpelle sur un ton venimeux. « Vous ne pouvez pas venir ici comme ça, nous menacer et vous l’approprier. Vous n’êtes pas comme ces raiders que je sache... Si ?! »

Le capitaine offre un simple geste de tête à ses comparses qui commencent à nous encercler. Mary pousse un petit cri aigu alors que l’un des soldats s’approche d’elle, l’arme pointée vers le bas mais pas moins menaçante.

« Vous allez coopérer, c’est d’accord ? On va vous attacher le temps de nettoyer la zone et on vous relâchera lorsque ce sera fait. Nous allons seulement vous soulager d’un poids. Les robots sont pas vraiment des baby-sitters idéaux. »

Je le devine ce sourire moqueur derrière son casque en verre fumé. Ce type se contrefiche de ce qui appartient aux autres - il compte bien se l’approprier en nous menaçant. Désespérée, les yeux effarés, je tourne la tête en direction de Loïc en lui intimant de faire ou dire quelque chose pour nous sortir de ce pétrin.

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'Jugement du hasard' :

Mais combien de fois pouvait-on bien être en danger dans une journée dans ce désert de folie ? Quelles étaient les probabilités qu’en l’espace de si peu de temps, Loïc fut mis en joue par deux personnes dans un restaurant paumé au milieu de nulle part où sa seule compagnie aurait dû être un coyote dévoré par les vers ? Saleté de monde de fous, il fallait le dire… Au moins, avec les étoiles, on savait à quoi s’en tenir, toujours là, luisantes au milieu de la galaxie… Un jour, peut-être, lui-même luira-t-il avec elles… Mais, en attendant, si son rythme cardiaque persistait, il ne viverais jamais assez longtemps pour ça. Il commençait à avoir le souffle court tandis que son cœur pulsait aussi vite que le son pouvait se propager dans son corps –bon, peut-être un peu moins quand même-.

La petite Sarah essaya tout de même de calmer le jeu en jouant sur la corde sensible avec ces types en armure assistée, ressemblant plus à des machines vues d’ici qu’à des hommes. D’ailleurs, ils réagirent comme tels, rien n'y faisait, les robots, c’était rare, les gens, beaucoup moins et donc, une denrée négligeable. Le capitaine laissa tout du moins l’esprit affolé de l’éclairé Apollier en paix en abaissant son arme et en s’approchant d’Alfie, tant mieux, plutôt le robot que lui, n’est-ce pas ? Une vie contre un tas de fils et de composant électroniques, ça valait la peine. Ce dernier persistait cependant à s’attacher aux deux jeunes sœurs, c’était touchant, d’une certaine manière, mais pas pour la confrérie qui le voulait.

Mais voilà que Sarah réagissait, affolée, terrifiée peut-être, elle l’aimait, ce robot, ça ne faisait aucun doute. Seule réaction à la détresse de la pauvre jeunesse : un prompt encerclement des trois survivants qui n’avaient rien demandé. Un cri fit tourner la tête de Loïc, Mary avait clairement plus que peur de l’homme menaçant qui l’approchait et le gradé exposa ce qu’il serait fait. Une voix tournait dans la tête de Loïc, la voix de la raison, la voix qui avait toujours dirigé sa vie ; « Ce ne sont pas tes affaires… Ce ne sont pas tes affaires… Ce ne sont pas tes affaires… » Il aurait la vie sauve dans tout ça, qu’importe le robot, il voulait vivre et il avait peur. Le regard suppliant de Sarah se tourna vers le sien et il le détourna, l’air désolé. Cependant, en fuyant ces yeux, il retomba sur Mary, son chapeau encore sur sa tête, apeurée, en larmes –peut-être, il avait du mal à voir à cette distance-. Et les yeux de Loïc, curieux mélange de peur viscérale, de colère, de compassion et culpabilité, croisèrent de nouveau ceux de Sarah. Ce n’était qu’un gosse… Il ne devait pas être plus vieux que Mary…

-Att… Attendez… Bégaya-t-il alors. L… La cache… Je suis là pour ça. Mais vous… Vous ne pourrez pas y entrer… Il y a eu un problème, c’est bourré de radiation, c’est trop dangereux. Alf… Le robot, je peux le reprogrammer pour qu’il fouille l’endroit… Et… Et si je peux emprunter un de vos casques… Je pourrais établir une liaison radios entre lui et les capteurs du robot et me débrouiller pour projeter les images… Si vous me permettez de garder ce que vous ne voulez pas...

Les idées se bousculaient dans le crâne de Loïc, les ressentiments, eux, essayaient de s’approprier son estomac. Il n’avait que vaguement l’idée de comment il pourrait faire ce qu’il avait dit, mais ça n’avait pas d’importance, ce qu’il voulait faire, c’était tout autre chose. La voix s’était de nouveaux réveillée, « tu es fou, tu es totalement cinglé, tu vas crever comme un con pour des fillettes que tu connais à peine et un tas de ferraille », mais les cris… Ils résonnaient encore dans son crâne, et les yeux de Sarah… Il ne pouvait pas, non, il ne pouvait pas ne rien faire.

Lentement, profitant d’une poignée de seconde de silence suite à sa remarque inattendue, il se décala vers Alfie en faisant un signe du regard à Sarah. Il fallait qu’elle comprenne, il fallait absolument qu’elle fasse comme lui… Les Mr Handy avaient un lance-flamme intégré, Loïc pensait savoir où ils gardaient leur carburant en stock, et alors… Il pourrait déclencher la fournaise salvatrice, mais Sarah et Mary devaient être proches de lui pour passer par la fenêtre derrière Alfie.

#Lancer de dé :
REUSSITE : L’escouade croie Loïc et le laisse faire son oeuvre
ECHEC : Ils ne laissent plus Loïc approcher du robot

HRP:

Alors que Loïc continuait à approcher lentement du robot, le gradé semblait hésiter. Pourquoi est-ce que ça ne fonctionnerait pas ? Ça avait déjà marché avec une femme de la confrérie, alors pourquoi pas lui ? L’instant de battement dura encore un peu, puis le capitaine fit un geste de son arme.

-Très bien, allez-y, vous aurez le droit à ce qui ne nous intéresse pas tant que ça ne nous ralentit pas. Mais attention, je n’hésiterais pas à vous tuer si vous essayez de me berner…

Avec un petit soupir de soulagement et un rapide hochement de tête, Loïc alla rapidement à l’arrière du robot, espérant que Sarah comprendrait. Le plus dur était fait, maintenant, il s’agissait de déverser les réserves du robot sans se faire découper par celui-ci… Il lança un regard plus appuyé à Sarah, il préférait éviter les clins-d’œil trop voyant.

-Empêche ton robot de réagir le temps que je l’ouvre pour entrer dans son système, petite…

Elle s’exécuta, quel qu’en soit la raison, et Loïc ouvrit sans peine le robot à l’aide d’un couteau trouvé sur un plan de travail qu’il utilisait comme tourne vise. Il coupa alors temporairement l’alimentation de l’engin, et entreprit de chercher ce dont il avait besoin. Comme prévu, presque trop facilement même, il n’eut pas de mal à dénicher le combustible stocké dans des petites bombonnes métalliques non loin de la jonction entre l’un des bras d’Alfie et son corps. Par chance, Loïc était derrière le robot, et les hommes de la confrérie de l’acier ne pouvaient pas voir distinctement les pièces qu’il enlevait et remettait. Alors, Loïc attrapa les bombonnes et les retira lentement et fit un signe de la tête à Sarah.

-J’ai besoin de main supplémentaire, petite, de préférence, si on ne veut pas abimer quelque chose à l’intérieur, viens, petite.

Alors que les soldats grognaient, visiblement plus vigilant et prêt à en finir avec les importuns, la jeune femme suivi de sa petite sœur, certainement apeurée, approcha. Faisant un léger geste de sa main gauche tenant un pan de son manteau servant à maintenir les bombonnes pour que Sarah les vis, il lui murmura quelques mots.

-Restez derrière Alfie, rebranche l’alimentation dès que je te le dis.

Loïc ouvrit les récipients de carburant et les fit rouler devant lui tandis que sa main droite maintenait deux fils préalablement coupés en jonction en criant un « Maintenant ! ». Tout alla très vite, une explosion, la chaleur, les flammes qui jaillissaient, la douleur dans sa main… Il s’entendit crier « Tirez-vous ! » avant de s’étrangler dans un cri de douleur en essayant de projeter le robot par la fenêtre.

HRP no2:

Le membre 'Loïc Apollier' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

'Jugement du hasard' :

Désemparée, je braque mon regard sur Loïc dans l’espoir de voir celui-ci réagir. Je ressens sa crante viscérale à l’instant même où elle suinte de ses pores et j’imagine que c’est perdu d’avance à en deviner l’autorité toute puissante de tous ces types qui nous font face. Et pourtant, alors que je ne m’y attendais plus, le voyageur prend la parole avec hésitation pour leur servir une histoire bidonnée qui me saisit de stupéfaction. Mes yeux roulent de ma sœur à Loïc avant de s’attarder avec défiance sur les confréristes qui jaugent leur interlocuteur avec perplexité. Je me mords férocement la lèvre inférieure, me redressant pour mieux me camper devant Alfie, prête à me battre comme une forcenée si toutefois ils s’essaient à me l’arracher. J’écoute distraitement la proposition de Loïc tout en guettant les réactions des soldats, me demandant avec une curiosité exigüe ce à quoi le voyageur pense en évoquant la reprogrammation éventuelle d’Alfie pour en faire un éclaireur. Et dans le cas où il dirait vrai et où il chercherait simplement à ne pas repartir bredouille en se contrefichant bien de mon sort ou celui de mon robot ? A cette pensée, je tourne brusquement la tête vers lui pour le sécher d’un sombre regard. Venimeux.
Et pourtant, un éclat de connivence attire mon attention tandis qu’il se range lentement derrière le robot, attendant patiemment l’autorisation du capitaine pour poursuivre la manœuvre. Finalement, après un silence qui me semble interminable, le gradé donne son accord et Loïc accède à ses circuits en m’interpellant pour tenir Alfie tranquille. Je reste durant un court instant immobile, peu certaine de la marche à suivre. Je finis par traîner des pieds jusqu’à lui pour échanger un regard entre interrogation et agacement avant de me résoudre à poser la main sur l’épaule de mon robot en lui murmurant.

« Tout va bien se passer Alfie. Laisse toi faire. » Je jette quelques coups d’œil prudents en direction des hommes armés avant de biaiser mes prunelles acides sur ma sœur contrainte à rester auprès d’un des leurs. « S’il vous plait, vous terrorisez ma sœur. J’aimerais lui serrer la main. C’est que comme ça que je parviens à la calmer. »

En sous-entendant que Mary a quelques séquelles psychologiques, j’espère simplement qu’ils daignent la relâcher et lui permettent de rester à mes côtés. Alors que Loïc tripatouille à l’intérieur de mon Handy, il joint son argument au mien en lui proposant de nous aider à la tâche. L’homme concède finalement à la laisser partir dans notre direction et je l’attrape par la main avant de croiser le regard de Loïc qui me désigne discrètement les bonbonnes de gaz qu’il vient de retirer du robot. En silence, je me poste à ses côtés et acquiesce du chef en entendant ses instructions. Malin. Je devine sans problème ses intentions et j’oblique un regard inquiet dans le sien. Tout faire péter ? C’est une alternative risquée, mais je vois difficilement comment l’on peut s’en sortir indemne dans tous les cas. Suis-je égoïste à vouloir penser que la vie d’Alfie vaut bien plus que celle de ces hommes qui braquent le canon de leurs armes sur nous sans le moindre scrupule ? Je sens cette amertume qui m’entête. Et cette féroce ténacité. Je renvoie à Loïc un regard convenu, et malgré mes mains moites, je parviens à réagir assez rapidement à son signal. Une fois les bonbonnes à terre, Loïc parvient à créer une explosion qui nous souffle vers l’arrière. Surprise mais guidée par l’instinct de survie qui me tenaille le ventre, j’attrape ma sœur par ma main pour l’entraîner vers la fenêtre et l’aider à sortir. Alfie se trouve balancé sans grande douceur et retombe sur le sol dans un tintement de surprise.

« Plait-il ? » S’étonne-t-il, subissant l’action sans vraiment comprendre ce qu’il se passe.

Je me tourne brusquement vers Loïc, mon avant bras devant mon visage pour me protéger des flammes qui lèchent les quelques mètres qui nous séparent de nos ennemis.

« Loïc, vite ! » En m’approchant pour l’attraper par le bras, je vois sa peau douloureusement brûlée au niveau de sa main. « Merde, viens ! Dépêche ! » Que je lâche sous le coup de la surprise avant de l’aider à passer à travers les fenêtres et me jeter à sa suite. Une fois au sol, subissant les volutes de poussière qui nous font suffoquer, je regarde tout autour de moi d’un air paniqué. Le désert. Notion invariable et envahissante. Comment trouver le moindre échappatoire dans un endroit pareil ? Longeant le mur en jetant des regards courroucés à ce qui nous entoure, je finis par arriver jusqu’au mur adjacent et braquer toute mon hostilité sur d’éventuelles silhouettes qui s’approcheraient.

« On va pas tuer ces types ??! Si ? Non ! » Tuer des animaux sauvages qui veulent nous faire la peau est une chose, mais refroidir quelques hommes en est d’autres ? Surtout des types de ce genre, super-entraînés avec des armures béton. « Venez, on court ! C’est notre seule chance, si ils sont venus pour cette fameuse cache, ils ne perdront pas notre temps à nous courser dans le désert pour récupérer Alfie ! »

C’est une idée comme une autre parce que trouver une solution devient urgent. J’attire ma sœur et m’assure que Loïc peut nous suivre dans cette course effrénée. Une première série de rocaille s’offre à nous et je m’y range avec angoisse, le palpitant à cent à l’heure.

#Lancer de dé :
REUSSITE : L’escouade laisse tomber les recherches et se concentrent sur la cache.
ECHEC : Les ennemis se décident à les talonner.

Des éclats de voix nous parviennent et je sens mon sang ne faire qu’un tour dans mes veines. Ma main se crispe instinctivement sur l’avant bras de Loïc qui se trouve à mes côtés et j’essaie de reprendre mon souffle pour ne pas suffoquer bêtement de panique.

« Non, non, non ! » Je déglutis difficilement avant de reprendre. « Si on se lève et qu’on court, rien ne les empêchera de nous tirer comme des lapins. »

Repérant d’un œil que Loïc souffre de sa main, je lui tends un mouchoir de tissu propre que je gardai depuis un moment sagement planqué dans la poche de ma veste. Je regrette de l’avoir entraîné dans cette situation, et je ne peux que lui être reconnaissance pour ce qu’il a fait pour nous en sortir.

« Merci Loïc. Vraiment, pour ce que tu as fait... » Ma sœur m’interrompt en se planquant contre moi et je devine que les hommes en armures toisent dans notre direction pour nous trouver. La respiration saccadée, je prends le temps de réfléchir à quelques alternatives mais je n’en vois aucune. « Si j’accepte de leur donner Alfie, peut-être qu’ils accepteront de nous laisser partir vivants. »

Mon ton est désemparé. Avoir fait tout ça pour rien me laisse un goût amer en bouche, surtout vu les risques pris par Loïc. Mais voilà que je me gratte la caboche, essayant de faire le nécessaire pour réfléchir correctement. Puis d’un seul coup, je me redresse, les paumes de main tournées vers les deux confréristes qui sondent le périmètre tout en les interpellant d’une voix forte.

« Attendez, ne tirez pas ! Je veux parler avec vous. J’suis sûre qu’on peut s’arranger. » Sans même jeter un regard à mes comparses, espérant qu’ils ne soient pas assez bêtes pour montrer le bout de leur museau, je m’avance vers les deux hommes en mettant mes mains bien en évidence. Quelques mèches de cheveux me volettent dans les yeux et je les rabats sur mon front collant dans un geste agacé. « J’ai des capsules... Quelques objets, tenez regardez... » Je balbutie intentionnellement, sentant tout de même mon estomac se nouer avec virulence. Je vide le fond de mes poches, l’air perdu, et je fais mine de vaciller pour me retrouver genoux à terre, ramassant les quelques objets de mes mains tremblantes. Profitant de la méprise et du flottement durant lequel les confréristes ne savent quoi faire, je soulève un nuage de sable à la gueule de ces derniers pour les déstabiliser. Epaule en avant dans une impulsion suicidaire, je finis par en bousculer un pour lui arracher son arme des mains.

« Vous bougez plus où j’hésiterai pas à tirer sur votre ami ! » Que je hurle à pleins poumons, me retrouvant avec une arme dont j’ignore tout du fonctionnement entre les mains.

Le membre 'Sarah Sheppard' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

'Jugement du hasard' :

Tout était si flou et confus… Il y avait eu l’explosion escomptée, la remise en marche du moteur à air comprimé d'Alfie avait fourni l’impulsion nécessaire pour que Loïc puisse le projeter, les deux jeunes femmes avaient réussi à s’enfuir, mais lui, il restait sur place, perdu dans les brumes étranges de ce qu’il lui semblait être un rêve. De sa main gauche, il tenait son poignet droit et contemplait sa main cloquée et roussie. L’odeur… C’était si étrange… Ça ne sentait pas mauvais, oh non, loin de là, c’était même alléchant, et le grognard de son ventre n’oubliait pas de se faire entendre de nouveau. Mais, montant avec les fumées de l’incendie, une voix s’immisça dans le rêve, lentement, perçant le voile de semi-réalité qui entourait éphémèrement Loïc.

Et la douleur revint. Avec le retour à la conscience, les appelés de Sarah, la chaleur du désert exacerbée par les flammes, la lancinante douleur se remettaient à pulser dans la main de Loïc, descendant pour envahir son bras entier. Réfléchir et comprendre les choses les plus simples demandaient un effort fou au pauvre homme, tellement d’informations se bousculaient dans son crâne… Qu’importe ! Le moment n’était pas à la réflexion ! Ne lâchant pas son poignet, collé contre sa poitrine, l’ex habitant de l’abri suivi de son mieux le rythme imposé par la jeunesse devant lui, étouffant ses grognements en serrant les dents. Les choses redevenaient de plus en plus claires, le choc commençait à se dissiper et des mots purent se former dans la bouche du descendant français pour répondre aux inquiétudes de sa jeune compagnon d’infortune.

"-Les tuer ? Non, de toute manière, même si on le voulait, je vois pas comment on ferait… Ces types sont en armure assistée, les balles ne leur font pas plus mal qu’un moucheron qui s’écraserait sur leur front… "

Et la course reprit, au milieu des rocailles, dans l’espoir de ne pas être suivi par ces hommes dont l’objectif n'était tout autre que ces quelques voyageurs des terres dévastées. Mais le devoir faisait bien pâle figure face à la colère d’un homme floué, la patrouille de la confrérie n’abandonnait pas tandis que le petit groupe se cachait derrière des rochers. Loïc ne pouvait s’empêcher de pester dans la langue de ses ancêtres –habitude prise en entendant son père et son grand-père en faire de même- à chaque fois que la douleur se faisait trop forte ou que leurs poursuivants se faisaient entendre de leur pas lourd derrière eux. Loïc sentit les mains de Sarah qui le tenait se serrer sur son bras, elle avait peur, au moins autant que lui. Poussé d’un élan de générosité, il fit un sourire qui se mua bien vite en une grimace douloureuse à la jeune femme tout en essayant, sans grande conviction, de détendre un peu l’atmosphère.

"-Je crois que je vais devenir l’ennemi numéro un de la confrérie si ça continue…" Et, alors que Sarah lui bandait sommairement la main, il répondit à son idée de sacrifice fort louable de son Mr Handy. "Ces gars sont des fous de la technologie, ils ont bien mieux qu’un robot comme ça… S’ils ont pris la peine de nous suivre, ce n'est pas pour récupérer Alfie, ça, je peux te le garantir. "

Mais, sans attendre, et sans qu’il puisse la retenir, Sarah sorti de la cachette. La petite fit des prouesses devant les yeux incrédules de Loïc, parvenant à s’emparer de l’arme d’un des poursuivants. La poussière… Fléau de toute l’électronique, plutôt maline, la jeune. Loïc ne pouvait s’empêcher d’imaginer la figure déformée par la rage et l’étonnement du gradé qui avait conservé son arme. Mais, maintenant, il fallait prier. Si Sarah s’était emparée d’une arme laser, elle serait morte. Ces type d’armes n’avaient presque aucun effet sur le métal, et encore moins sur une armure assistée. Loïc n’arrivait pas à identifier l’arme volée, il avait encore trop de mal à réfléchir, mais il fut rassuré par la voix du capitaine.

"-Ne joue pas à la plus maline petite, tu n’as aucune chance. Tire lui dessus, et tu ne lui feras rien. Pose ça ou c’est toi qui finis grillée… Si tu ne fais pas de vague avec ta sœur, je vous laisserais tranquille en ne prenant que votre robot. Mais au petit malin qui se cache encore, je lui dis que je l’avais prévenu, il doit mourir, on ne berne pas impunément la confrérie. "

Une chose était irréprochable au sein de la confrérie : l’attention qu’elle prêtait à ses membres. Si l’homme discutait, c’est qu’il voulait éviter que tout mal soit fait aux siens. Le sentiment de responsabilité revenait au galop, en même temps que les idées les plus folles dans l’esprit de Loïc, et parmi ces idées, il ne saurait certainement jamais pourquoi, il en prit une comme solution. Il avait devant lui la face encore ouverte du robot.

"-Désolé Alfie."

Il débrancha l’alimentation de sa main gauche tremblante et délogea la pile atomique de son emplacement, la calant entre son bras droit et sa poitrine. Il se sentait fou en dégainant son révolver et en le pointant droit sur la pile tout en sortant pour se placer entre le confrériste armé et Sarah. Maintenant, il parvenait à identifier l’arme, c’était une arme électromagnétique.

"-Dix pour cent de chance de n’avoir aucun effet, trente d’endommager les systèmes de l’armure et de laisser votre gars quasiment coincé là-dedans, trente autres de faire des dommages graves à son armure, irréparables qui le laisseront comme une statue entrain de cuire au soleil, vingt de lui provoquer des brulures sous l’armure et dix de le griller totalement en même temps que son armure… Tu veux vraiment prendre le risque ? À ton tour de ne pas jouer au plus malin, si vous tirez sur la fille, je nous fais tous sauter sur place avec cette foutue pille nucléaire, ça, je te le garantis, et si tu tires sur moi, c’est ton copain qui crame dans son four. Je propose un deal, la fille et toi, vous posez vos armes au sol, vous rentrez dans le bâtiment et nous on se tire de là, quand on sera loin, vous reprenez vos armes et votre mission. Personne meurt, personne n’est blessé."

#Lancer de dé :
REUSSITE : La patrouille accepte
ECHEC : La patrouille refuse

EDIT après

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'Jugement du hasard' :