Il se trouvait dans la nuit, dans le noir, plongé dans les ténèbres et emmitouflé dans quelques sales couvertures brunes. Aaron tentait de trouver le sommeil, mais cette nuit n'était pas commune à toutes les autres. Ce soir-là, précédait des retrouvailles qu'il appréhendait. Rares étaient les fois où Aaron ressassait son passé, exceptionnels étaient les fois où ses souvenirs l'empêchaient de dormir. Il lui était impossible d'oublier car, il était tel un livre, sa peau était le papier et les mots ses cicatrices. Il se souvenait de chacune d'entre elles, certaines, une, saigne encore. Doucement, il frôla maladroitement de sa main droite les marques macabres comme s'il voulait les déterrer une dernière coup avant de s'endormir.

Son index parcouru tendrement une légère entaille sur sa main gauche, il avait quel âge ? Quatorze ans ! C'était la première fois qu'il donna un coup de couteau dans le corps d'un être humain, vivant. En aidant à dépecer l'être, il s'était entaillé la main gauche. Il aimait sa famille, sa mère, son père et tous les autres. Il fut élevé pour défendre le ranch, comme les autres hommes, au fond, il a toujours voulu faire plus. On lui apprit à se battre, avec une arme blanche et avant tout, avec une arme à feu. Ouai, les armes à feux, il adorait ça. Elles lui donnaient un sentiment de puissance inouïe. Pourtant, les hommes lui répétèrent que ce n'était pas un jouet, mais ils comprirent que l'enfant était le genre d'idiots qui ont besoin de se brûler. C'est entre la fierté et la honte, qu'il s'avoue avoir été un garçon désobéissant.

Puis il frôla une cicatrice qui se trouvait sur son coude gauche. Les armes l'excitaient tant à l'époque qu'il voulu se mettre à l'épreuve, il avait alors seize ans et il se baladait dans les terres sauvages, en plein jour et armé d'un pistolet. Malheureusement, il chercha la bagarre, et la trouva. Sauf qu'au lieu de tuer, son arme s'enraya. C'était sûrement des raiders, ils avaient moins de sang que de Jet dans les veines, alors pour l'enfant ce fut facile de les énerver. Sa présence suffisait. Il se cacha et fut sauvé. Ce n'était pas un membre de sa famille, ni personne de sa connaissance, la seule chose dont ce souviens l'enfant, c'était ces mots '' cours, garçon, cours !''. Alors, il obéit et courut, il n'avait jamais couru* aussi vite tandis que les balles fusaient autour de lui. C'était fantastique ! De l'adrénaline pure ! Jusqu'à qu'il tombe s'écorchant peau et chaire. Il sut alors que le chemin allait être long

C'était sa première course pour devenir un homme. Dans ces conditions, comment tenir immobile dans un petit ranch ? Alors, il s'arrangea pour être à l'extérieur le plus souvent possible et il courut après l'aventure. Un jour dans sa course il tomba sur une superbe femme, elle était plus vielle que lui, de quelques années seulement. La vie de la demoiselle était remplie par les voyages, le sang et la peur. Une vie rêvée par l'enfant. Si quelques années les séparaient physiquement l'un de l'autre, mentalement elle avait des décennies de plus que lui. Alors, elle devint son professeur et il la remerciait en couchant avec elle. On peut dire que c'était de l'amour. Un amour qui l'amène à caresser bien d'autres cicatrices.

Ensemble, ils ne rôdaient jamais très loin du ranch, elle avait sa propre planque. Elle lui montrait comment se battre, c'était moins spectaculaire que les hommes du ranch, mais aussi moins bruyant. Alors, il apprit comment se mouvoir sans bruit* et à casser sa silhouette à la vue de ses ennemies tout en gardant ses sens en alerte. Elle lui enseigna la vigilance, déceler le moindre bruit suspect. Cependant, lorsqu'ils avaient tué un être humain, c'est Aaron qui devint le professeur, un sinistre enseignant. Peu à peu, il insuffla dans son esprit fragile des idées malsaines. Il fut son plus grand amour, son pire cauchemars et son assassin. C'est elle, la première qu'il a séduit avec les mots et trahis avec son arme.

Son index caressa une longue cicatrice verticale sur son estomac, une autre sur son torse, à droite ; une dernière qui se trouvait en dessous de son pectoraux gauche et les quatre autres qui parcouraient ses jambes. Un jour, combien avait-il ? Ah ! Bientôt vingt-deux ans. À presque vingt-deux ans, il partit. Il quitta sans crier garde, mais tous savaient qu'ils s'étaient enfuit avec une femme et tous connaissaient son désir de s'enfuir à l'aventure. Sa famille n'avait jamais croisé son amante. Elle ne pouvait pas ce sédentarisé, elle avait l'impression de devenir folle à rester au même endroit.

Elle lui proposa de partir avec lui et il accepta, sa course pour devenir un homme allait se terminer. Il voyagea pendant sept ans, il fut blessé de nombreuse fois, ses cicatrices, plus que des souvenirs, sont des leçons, les seules qu'ils pouvaient comprendre. Elles étaient données par des griffes, des crocs et des armes. Il vécut pendant toutes ces années en récupérant à droite et à gauche ce qu'il put trouver dans les ruines de l'avant-guerre. Sept ans de malheur qu'il ne peut regretter, mais il passa une bonne partie sans son amour. Alors la main de l'homme s'arrêta, il craignait de toucher sa dernière cicatrice de peur de raviver la douleur, puisqu'elle saignait toujours.

Au-dessus de son poitrail, juste en-dessous de son épaule gauche il y a une marque discrète : un petit rond affreux. Lorsqu'il la toucha, il grimaça et serra les dents à sans faire péter les molaires. Il souffrait comme s'il avait remué un poignard figé dans cette maudite épaule ! Celle-là apparut la deuxième année de son voyage, c'était la nuit où ils furent séparé par la folie de la jeune fille. Il était la cause de cette folie car, il lui apprit à aimer un homme et la chaire d'un homme alors, dans son esprit fragile tout se mélangea. Si Aaron regrette une chose, qu'une seule chose, c'est cette nuit.

Elle voulut le tuer pour le dévorer, elle voulait le tuer rapidement, une balle dans le crâne, mais il dévia son tire en lui lançant son coupe-coupe à la figure, littéralement. Il avait agi sans réfléchir, un réflexe inscrit dans son esprit. Elle se retrouva par terre, le visage fendu en deux, mais vivante. Il s'approcha d'elle, il n'osait pas la toucher, il était pétrifié de peur à l'idée de lui faire plus de mal, il ne courait plus. Il n'avait aucune connaissance en médecine, il ne pouvait pas l'aider et elle se mourait ! Ses mains prirent sa tête en étaux. Il commençait à gémir je ne sais quoi, jusqu'à qu'il aperçoit les yeux verts de la fille, il y vit sa désolation et son désespoir. Elle semblait être désolé de son désir bannit, il l'avait tué et elle était désolée pour lui ?!

Alors, pour la première fois dans sa vie, il se conduit en homme, il tomba à genoux en larme et il acheva la fille en enfonçant la lame un peu plus profondément. Le rouge du sang se confondit avec celui de sa chevelure. Il l'avait brisé, il avait remarqué qu'elle devenait étrange, mais par amour il avait fermé les yeux alors que par amour il aurait dû agir. Terrassé par la douleur il ne sentait pas le sang qui s'écoulait de son épaule, par chance la balle était ressortie. Cela faisait six ans qu'ils se connaissaient, il l'enterra car, l'on ne mange pas un de sien et même dans la mort elle était sienne.

À partir de là, il avait continué à avancer par habitude et n'avait pas fait demi-tour par orgueil. Cinq ans après. Un jour il eut assez de temps pour réfléchir sur sa vie et ce qu'il découvrit dans son cœur l'étonna : sa famille lui manquait. Il avait beau jouer les enjoliveurs, il était une bête qui avait besoin de lécher ses blessures, mais surtout il avait besoin de défendre quelque chose de plus grand que sa vie. Les siens lui manquaient et il n'avait pas sa place sur les routes c'est la plus grande leçon qu'il apprit en sept ans.

''Alors, demain je retournerais chez moi. Vaille que vaille je retourne chez moi. Peu importe l'accueil je serais chez moi.''

Après ses mots, l'homme s'endormit. Demain, un enfant protégé par son foyer, un adolescent pétrit par de grand désir interdit et un homme bâtit sur les petites tragédies de la vie allaient retrouver leurs places, enfin !