Je remontais du niveau moins deux après une matinée plutôt calme passée à attendre à l'infirmerie. De fait, j'avais eu tout le loisir pour faire un inventaire rapide des médicaments, compresses et autres seringues qui composaient, entre autre, les ressources médicales de la Confrérie. J'avais délaissé ma blouse blanche au profit de mes habits « civils » qui se résumaient à un juste au corps de type t-shirt bleu-marine et un pantalon souple serrant mes jambes au plus près, d'une teinte plus sombre tirant sur le noire. Comme à l'accoutumé, je portais mon Glock Defender, sagement déposé dans son holster, attaché sur mon flanc, sous mon aisselle. Simple question de sécurité, même si le bunker était confortablement gardé, nuit et jour, par des Chevaliers en factions, disséminés à tous les endroits stratégiques menant au complexe.
J'aimais bien remonter vers le premier niveau du bunker. Ici et là se trouvaient des étrangers venus des Terres Dévastées du Colorado, qui du marchand qui marchande, qui du colporteur qui colporte, qui du négociant qui négocie, et autres fermiers apportant leur lot de viande, légumes, et fruits, le commerce avec le blockhaus de notre Chapitre du Midwest était florissant et pour le moins prospère. L'ambiance était moins feutrée que dans les niveaux inférieurs réservés exclusivement aux frères et sœurs. Et puis, il suffisait de passer le poste de garde pour accéder au soleil, au vent et à la poussière, et surtout, au ciel. Pour autant, je n'avais pas la nostalgie des grands espaces, me sentant très bien dans mon cadre fait de béton armé. Cet aspect là de notre habitat avait quelque chose de sécurisant, et surtout, aussi bizarre que cela puisse paraître pour un observateur extérieur, quelque chose de familial.
L'élévateur m'emmena assez rapidement vers le niveau le plus proche de la surface, à savoir le niveau moins un. J'avais du attendre dix bonnes minutes avant que ce qui nous servait d'ascenseur ne fasse l'aller retour entre le bas et le haut. Ce n'était pas super pratique comme moyen de locomotion interne, mais qu'importe. On avait fait avec ce qu'on avait découvert quand le Chapitre s'était approprié les lieux. Bon quelques aménagements par ci par là seraient les bienvenus mais qu'importe. Je pénétrais donc au niveau moins un. C'était aussi l'emplacement privilégié pour les départs des équipes, assurant ainsi qu'un maximum d'invités puissent contempler les hommes et femmes dans leur lourdes armures assistées. Pour qui n'était pas familier, le spectacle avait de quoi en jeter, il fallait quand même le reconnaître. Pour ma part, je n'y accordais qu'un bref regard, coutumière des sorties en extérieur avec ma propre équipe.
J'avançais vers le poste de garde dans l'idée d'aller contempler rapidement le ciel, quand un cri attira immédiatement mon attention. Balayant du regard la zone d'où émanait l'acclamation, je constatais alors qu'un type s'était blessé au niveau du bras. Perplexe, j'attendis quelques secondes qu'il se retourne pour observer que ce n'était pas un résident du bunker, mais bien un de ces étrangers. L'envie d'aller l'aider se disputait à celle de continuer mon chemin. Après tout, ça ne semblait pas très grave vu de là, et je ne le connaissais pas du tout. Finalement, j'approchais, la mine fermée.
« Bonjour, vous voulez que je regarde ça, je suis un des médecins de la Confrérie. »
J'accompagnais ma petite introduction d'un sourire, mi figue mi raisin, attendant les premières réactions de l'individu avant de me montrer un peu plus cordiale. J'étais alors persuadée qu'il allait m'envoyer paître. Les types gaulés comme lui avaient souvent tendance à ne pas jouer les chochottes avec les demoiselles. Je me forçais néanmoins à ne pas me faire d'apriori trop rapidement sur son compte. Toujours est-il que je n'avais pas esquissé le moindre geste pour regarder son bras. Pas sans sa permission. La journée avait été calme certes, mais je n'étais pas accroc à la médecine au point de sauter sur le premier bobo venu.